Visages féroces, terrifiants, mystérieux... mais aussi parfois rigolards. C’est dans une tradition plusieurs fois millénaire que s’inscrivent les masques de Chine des xviie, xviiie et xixe siècles exposés au musée Jacquemart-André. Ils feraient volontiers fuir, et ils étaient bien destinés à faire fuir les démons et esprits maléfiques supposés à l’origine de tous les maux des humains.
Dans les anciens rites d’exorcisme du Nuo, ils participaient à l’expulsion du Petit Démon. La cérémonie rituelle symbolise une expédition militaire dont les officiers sont des divinités. Les masques des trois plus grands dieux sont gardés sur l’autel ou dans un palanquin, les autres dieux, incarnés par des hommes masqués, viennent danser. Finalement l’un d’eux s’empare du Petit Démon et le chasse hors du village, comme on le voit dans le film projeté dans l’exposition.
Au cours des siècles, aux rites magiques se sont ajoutées des saynètes comiques. Le rire n’est-il pas un puissant moyen de lutter contre les démons ? Ces divertissements ont ensuite donné naissance à une tradition théâtrale aboutissant à la naissance de l’opéra chinois. Les masques sont alors souvent remplacés par des maquillages. Issu d’une pratique d’exorcisme, le masque a évolué vers une forme d’expression artistique de l’âme humaine.
Disparu dans les villes, le Nuo reste vivant dans les villages du sud-ouest de la Chine. La Révolution culturelle l’a pourchassé, détruisant de nombreux trésors, mais dans les années 1980 des masques anciens longtemps dissimulés dans les maisons ont reparu et certaines processions du Nuo sont encore visibles de nos jours.
Le gouvernement chinois veut maintenant protéger son patrimoine immatériel dont les rites anciens, les danses masquées et le théâtre de rue sont les éléments phares. L’Unesco elle-même soutient ce mouvement. La Chine tellement riche de son passé artistique avait jusqu’ici méconnu la valeur de ses arts et traditions populaires que l’on commence seulement à étudier.
« Masques de Chine, rites magiques de Nuo », musée Jacquemart-André, 158, bd Haussmann, Paris VIIIe, tél. 01 45 62 11 59, jusqu’au 26 août 2007.
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Les vrais visages de la Chine traditionnelle
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°591 du 1 mai 2007, avec le titre suivant : Les vrais visages de la Chine traditionnelle