Les prélèvements de l’œil

Cet automne, c’est au tour de Jean-Charles Vergne, directeur du Frac Auvergne, de construire, à partir de quatre-vingt-dix pièces de quarante auteurs majeurs de la photographie contemporaine, son propre récit centré ici sur la question du geste photographique, « tension produite par l’œil du photographe ».  Avec en prologue, l’image elliptique d’une peau de tambour de la série Géographie II de Patrick Tosani, belle introduction à un parcours découpé en huit sections qui, du « regard diagnostic » des maux de l’homme infligés par l’homme au « ciné œil » relatif aux liens entretenus avec le cinéma et ses techniques, balaient en « coupes géologiques » les différentes approches du médium pour finir sur la vision de Mars et l’œil automatisé d’un robot spatial.

Au-delà de la démarche volontairement pédagogique du parcours, c’est le choix et l’association des œuvres, leur résonance quand elles sont dans des espaces ouverts, qui  réservent les plus beaux moments. En particulier à l’étage quand le Paysage ordinaire de Xavier Zimmermann, focus de brins d’herbe mâtinés de rosée, jouxte un oiseau de Jean-Luc Moulène. Pur instant de poésie qui rend presque caduque la rigueur géométrique de Stéphane Couturier, ici cristallisée dans une de ses photographies réalisées dans une usine Toyota de montage automobile. Car au-delà des pièces exceptionnelles rassemblées, c’est la mise en écho ou en dissonance qui fait l’intérêt de ce récit à la fois très intellectualisé dans son discours et sensible dans son accrochage.