Les Gallerie dell’Accademia, à Venise, ont réuni les différents cycles des Histoires de Vittore Carpaccio.
VENISE - Les Gallerie dell’Accademia à Venise offre une occasion exceptionnelle de voir réunis tous les cycles picturaux de Vittore Carpaccio (1455-1526) « peintre d’histoires », comme l’indique le titre de l’exposition.
Venise est riche en témoignages de ce peintre auquel Pietro Zampetti avait dédié une exposition en 1963, la dernière en date, au Palais ducal. Le cycle complet des « Histoires de sainte Ursule » (neuf toiles), réalisé entre 1490 et 1495 et conservé au Musée, atteste des débuts de Carpaccio dans ce genre, dont l’extraordinaire goût narratif s’unit à une maîtrise désormais acquise de la perspective et à une utilisation éclatante de la couleur. L’artiste avait trouvé sa voie : le très célèbre Miracle de la relique de la Croix au pont du Rialto, peint avant 1494 pour la Scuola Grande de S. Giovanni Evangelista et aujourd’hui conservé aux Gallerie dell’Accademia, renseigne opportunément sur la vie vénitienne de l’époque. « De là, l’idée de réunir autour de ce noyau fort, que tant de musées nous envient, et autour du cycle de l’école dalmate de saint Georges encore in situ, les toiles d’autres cycles éparpillés autrefois», explique Giovanna Nepi Sciré, directrice des Gallerie dell’Accademia et commissaire de l’exposition, dans la préface du catalogue. Quant au Miracle de la relique de la Croix, il doit être mis en parallèle avec Gentile Bellini et sa non moins célèbre Procession sur la place Saint-Marc – peinte en 1496 pour la même Scuola Grande de S. Giovanni Evangelista –, qui s’étend sur plus de sept mètres et constitue un précieux document sur la configuration de la place antique.
À Venise, dans l’école dalmate de San Giorgio degli Schiavoni, est conservé depuis toujours le cycle des « Histoires des saints Girolamo, Giorgio e Trifone », réalisé entre 1503 et 1507. L’un des tableaux, qui représente saint Georges luttant contre le dragon, possède des transparences cristallines, voisines de la tradition nordique, et diffère par ses détails macabres, qui n’enlèvent rien toutefois à la sérénité du tableau. Ont été dispersés, en revanche, les deux cycles relatifs aux « Histoires de la Vierge » (1504) et aux « Histoires de Santo Stefano », le premier peint pour l’École degli Albanesi, le second pour l’école homonyme de 1511 à 1512, confirmant, en ce domaine, l’expérience d’un Carpaccio de plus en plus assisté par son atelier. Rassembler le cycle de la Vierge a été relativement facile : deux œuvres proviennent de la galerie Franchetti, à la Ca’ d’Oro (Venise), une autre est issue du Musée Correr (Venise), où elle est en dépôt, deux viennent de la Pinacothèque de Brera (Milan), et la dernière de l’Académie Carrara à Bergame. Il a été beaucoup plus difficile de réunir les toiles des « Histoires de Santo Stefano ». La Prédication de Brera et la Lapidation de Berlin, encore sur leur toile d’origine, trop fragiles pour être déplacées, sont remplacées par des reproductions ; un épisode a été définitivement perdu, mais il en reste le dessin qui a été prêté par les Offices (Florence). L’histoire de la dispersion des éléments a été très tourmentée. Une toile fut cédée en 1822 par les Gallerie dell’Accademia à l’abbé Celotti en échange de la collection des dessins de Giuseppe Bossi – parmi lesquels l’Homme de Vitruve de Léonard –, avec comme destination Brera, d’où elle a ensuite intégré la Staatsgalerie de Stutgaart (dépôt). Un autre tableau est arrivé à Brera, avant de finir au Louvre par le biais d’un échange voulu par Napoléon. Enfin, l’œuvre de Berlin a été mise sur le marché et acquise par David Weber.
Jusqu’au 13 mars, Gallerie dell'Accademia, Campo della Carità, Dorsoduro n.1050, Venise, tél. 39 041 5200 345, www.gallerieaccademia.org, tlj 8h15-19h15, 8h15-14h le lundi. Cat. éd Marsilio (Venise), 136 p., 24 euros.
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Les histoires de Carpaccio
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°207 du 21 janvier 2005, avec le titre suivant : Les histoires de Carpaccio