AMSTERDAM / PAYS-BAS
Qui aurait pensé qu’après sa mort, Millet, le chantre maintenant oublié de l’humble vie rurale, gagnerait en France et à l’étranger un rayonnement aussi durable et pour des motifs si divers ? Pissarro l’admire, Van Gogh aussi ; on sait que Millet est « son guide ».
Mais quid de Sérusier, Picasso, Segantini, Seurat, qui lui vouent une sorte de culte et adoptent certains de ses sujets ? Mettant chaque fois à l’honneur une toile emblématique du maître, les différentes sections de cette exposition relient entre eux tous les artistes influencés par le style à la fois classique et radical de Millet. Reprises fidèles, interprétations originales, pastiches intelligents, les noms des peintres qui puisent dans son répertoire surprennent : Hodler et son solide faucheur, Munch et la femme à sa toilette, Malevitch et ce bûcheron analytique, Rops qui diabolise Le Semeur. Il y a aussi Jan Toorop, qui habille à la hollandaise son paysan, et Nolde qui le fait moissonner. Sans oublier Dalí qui signe un Angélus« archéologique » et Sargent qui apprécie La Sieste. Pour les dessins et les pastels, affinités et dialogues sont également mis en écho au fil d’un parcours thématique, dense et démonstratif. Devant la cinquantaine de tableaux de Millet, beaucoup venus de musées non européens, on voit que le naturalisme, le réalisme et une certaine abstraction s’unissent pour faire de lui un novateur auquel ses « suiveurs » tantôt rendent un hommage fidèle, tantôt ajoutent leur touche personnelle. Une belle postérité.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°729 du 1 décembre 2019, avec le titre suivant : Les héritiers assumés de Millet