Lebel rebelle

Que liait Lebel à Tinguely ? Avec certitude, un goût commun de la provocation et de la mise en scène allié à une conviction profonde que l’art est chose politique. C’est une performance réunissant les deux artistes que l’exposition de Bâle met en lumière : celle du 14 juillet 1960, qui prit place à Venise durant la biennale d’art et qui consista à jeter une sculpture de Tinguely dans le canal de la Giudecca après l’avoir symboliquement poignardée. Restée pour la postérité Les Funérailles de La Chose de Tinguely, cette action décrétée premier « happening » en terre européenne est le cœur et la chair de l’exposition bâloise ; une série d’archives papier et photographiques vient compléter la lecture de cette performance qui fut à la fois une cérémonie commémorative de l’assassinat d’une jeune artiste vénitienne qu’une critique de la violente guerre en Algérie. Derrière la carrure et la présence imposante de l’artiste français, se dessine çà et là, en filigrane, la silhouette de Jean Tinguely, jeune artiste suisse fraîchement installé à Paris depuis 1952, mais déjà un esprit agitateur, et celle d’une époque riche en rébellions. Deuxième pièce centrale présente dans l’exposition, Les Avatars de Vénus, montage vidéo créé en 2007 qui compile plus de 7 000 images de corps de femmes, se révèle en contraste une version bien édulcorée de la création contestataire de Lebel.