Ils portaient tous les deux le même prénom. Ils furent tous les deux tenus dans l’ombre par leurs pairs. Ils se sont fréquentés dans les salons parisiens et sur le littoral azuréen.
Ces collusions suffisent-elles à assurer la pertinence d’une exposition consacrée à Henri Lebasque (1865-1937) et Henri Manguin (1874-1949) ? Telle est en tout cas la croyance du musée des Beaux-Arts de Roanne dont les cimaises sont durablement investies par une centaine de numéros des deux peintres.
En cette fin de XIXe siècle, les trajectoires de Lebasque et Manguin épousent les normes en vigueur. Quand le premier quitte Angers pour intégrer, en 1886, l’atelier de Léon Bonnat à l’École des beaux-arts de Paris, le second acquiert dès 1894 le privilège de suivre l’enseignement de Gustave Moreau dans la même institution. Toutefois, les neuf années séparant les deux hommes sont un gouffre quand les avant-gardes se succèdent annuellement. Pour preuve : Lebasque devient un adepte discret du post-impressionnisme tandis que Manguin s’impose comme un ardent prosélyte du fauvisme.
Et quand le Salon d’Automne de 1903 réunit leurs toiles majeures, les poudroiements divisionnistes et volontiers nabis de Lebasque semblent étrangers aux hardiesses acidulées et matissiennes de Manguin. Question de générations. Question de parentés.
En 1906, Lebasque découvre Saint-Tropez sur les conseils de Manguin. L’éden est une révélation, mieux, une injonction. À compter de ces récurrences héliotropiques, Lebasque alternera sans discontinuer des paysages chatoyants et cézanniens (La Vallée de la Garde, 1923) avec des scènes lascives toutes en délicatesse. De son côté, Manguin explorera invariablement les stridences chromatiques et les compositions saturées (L’Amandier en fleurs, 1907) que l’exposition roannaise, en se privant de toiles décisives, échoue à restituer.
Largement éprouvé lors de précédentes manifestations, l’enjeu des résonances méditerranéennes sur la palette des peintres eût nécessité une contextualisation ambitieuse et une efficience scientifique que la pauvreté du catalogue ne parvient pas à caresser. Aussi préférera-t-on à l’élaboration du propos initial la contemplation des toiles des années 1920 et 1930 qui, chez les deux artistes, dessinent une oscillation passionnante entre modernité et retour à l’ordre.
« Henri Lebasque – Henri Manguin. Palettes post-impressionniste et fauve en Méditerranée », musée des Beaux-Arts et d’archéologie J.-Déchelette, 22, rue Anatole-France, Roanne (42), tél. 04 77 23 68 77, jusqu’au 29 mars 2009.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Lebasque et Manguin
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°610 du 1 février 2009, avec le titre suivant : Lebasque et Manguin