Ce tas de pierre, au début de l’exposition, c’est du lard ou du cochon ? Liz Magor nous entraîne dans des territoires incertains, où malicieusement elle aime brouiller les cartes.
Tromper l’œil, fabriquer des leurres, c’est ce que cette artiste canadienne, née en 1948, pratique avec conviction. Ses pierres ne sont pas en pierre, mais reconstituées en gypse polymérisé. Les objets – sachets en papier, serviettes de toilette, gants, vêtements, plats – qu’elle transforme en sculptures, des moulages en silicone ou en gypse polymérisé sont toujours familiers et modestes. « Je passe des heures à créer des objets que je trouvais autrefois inesthétiques et insignifiants. » Elle les dispose associés à des objets manufacturés non transformés, comme des cigarettes, des bouteilles d’alcool, du chewing-gum, des vêtements « pour de vrai ».
Les sculptures de Liz Magor apparaissent tout simplement comme des juxtapositions ou des assemblages d’objets, sans que l’on puisse aisément discerner sans les toucher ou sans lire les cartels ceux qu’elle a reconstitués en trompe-l’œil et les autres, les « vrais ».
Plus d’un siècle après les premiers ready-made de Marcel Duchamp, Liz Magor joue avec les simulacres. Elle nomme « fausses images » ses moulages d’objets ordinaires, les opposant à la « vraie matière » des objets manufacturés. Le moulage d’un objet serait-il moins « réel » que l’objet qu’il reproduit ? Ces embrouillaminis sémantiques, que l’on découvre sur les nombreuses fiches d’explications mises à disposition du public, peuvent légitimement plonger le visiteur dans des abîmes de perplexité !
« Liz Magor »,
Musée d’art moderne et d’art contemporain (Mamac), place Yves-Klein, Nice (06), www.mamac-nice.org
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°709 du 1 février 2018, avec le titre suivant : Le vrai et le faux chez Liz Magor
