Marie de Brugerolle, historienne de l’art et commissaire invitée au Crac, présente une double exposition mettant en jeu « l’hybridation des corps et des formes […], ainsi que le passage des frontières, leur transgression, qu’elles soient physiques, géographiques, linguistiques ou culturelles ».
La première partie de ce projet est une plongée dans l’univers théâtral et baroque de Than Hussein Clark, artiste multifacette. À travers un riche parcours mêlant installations, sculptures ou œuvres sonores, l’artiste s’inspire de la ville méditerranéenne de Tanger et convoque de nombreuses figures artistiques qui y ont séjourné. Un motif de damier issu de la villa Mabrouka d’Yves Saint Laurent et de Pierre Bergé se retrouve tout au long de l’exposition, tandis qu’une série photographique met en scène l’assistant de l’artiste sur la tombe de Jean Genet à Larache (plus au sud). Than Hussein Clark ne se contente pas de dépeindre Tanger comme un eldorado pour créateurs occidentaux marginaux du siècle dernier, il s’attache également à en montrer les limites et interroge notre imaginaire colonial. Une installation monumentale conçue spécialement pour l’occasion investit une salle entière : 365 horloges, glanées à Tanger, sont installées sur différentes étagères, chacune faisant référence à une date clé de l’histoire coloniale du Maroc. Si cette exposition extravagante propose un véritable voyage transculturel et transhistorique de Sète à Tanger, sa force critique et politique se perd quelque peu dans un trop-plein de références, qui se mêlent, s’entrechoquent et nuisent à l’appréhension des œuvres.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°739 du 1 décembre 2020, avec le titre suivant : Le Tanger baroque de Than Hussein Clark