Très tôt, les dessins de Watteau ont été recherchés avec passion par les collectionneurs. La Frick Collection, à New York, en présente aujourd’hui une quarantaine, accompagnés de feuilles des artistes qui l’ont inspiré ou imité. Parmi ces derniers, la présence de Boucher n’est pas la moins surprenante.
NEW YORK (de notre correspondant) - Dès l’origine, les dessins de Jean-Antoine Watteau ont été accueillis avec un enthousiasme sans précédent pour un artiste français. Cinq ans à peine après sa mort prématurée en 1721, le premier volume du Recueil Julienne, une série de gravures réalisées d’après ses dessins, est publié par l’un de ses collectionneurs les plus fervents. Le marchand d’art Edmé Gersaint, grand ami de l’artiste, rappelle que “Watteau était davantage satisfait par ses dessins que par ses peintures. Il prenait plus de plaisir à dessiner qu’à peindre. Je l’ai souvent vu maussade parce qu’il ne pouvait pas rendre avec un pinceau l’esprit et la vérité qu’il pouvait exprimer avec un crayon.”
Virtuose dans la technique des trois crayons, Watteau excelle à saisir le caractère, le geste et l’humeur sur le visage et le corps. On peut affirmer sans crainte qu’aucun autre artiste n’a mélangé de façon plus émouvante le rouge, le noir et le blanc sur une feuille de papier. “Watteau et son monde : dessins français de 1700 à 1750”, organisée par Alan Wintermute, de Christie’s, compte environ quarante dessins de l’artiste, dont certains sont exposés pour la première fois. Provenant entièrement de collections américaines, ils sont complétés et accompagnés par quelques œuvres de prédécesseurs et suiveurs de Watteau.
“On oublie que la grande présentation de Washington et Paris sur Watteau remonte à quinze ans ; il y a donc une toute une génération qui n’a pas observé son œuvre à une telle échelle”, note Alan Wintermute, et, selon lui, il est important d’y jeter un regard nouveau à la lumière des études menées depuis 1984. “Il est également primordial de considérer Watteau dans son contexte et de montrer des œuvres d’artistes pour lesquels il représentait un modèle très vivant”, poursuit-il. Ses suiveurs les plus proches, Nicolas Lancret et Jean-Baptiste Pater, peintres de fêtes galantes, sont très bien représentés – notamment Pater, dont Trois têtes d’une servante noire, de Chicago, constitue probablement l’une de ses plus belles œuvres sur papier –, tout comme Boucher, dont la présence ici pourrait surprendre le public. “Boucher n’est habituellement pas vu comme un disciple de Watteau, mais il a passé deux ou trois de ses années d’apprentissage à étudier les dessins de Watteau. Il en a gravé plus de 100 pour le Recueil Julienne”, explique le commissaire. Le catalogue de l’exposition comprend des essais d’Alan Wintermute, de Margaret Morgan Graselli, Pierre Rosenberg et Colin Bailey.
20 octobre-9 janvier, Frick Collection, 1st East 70th Street, New York, tél. 1 212 288 07 00, tlj sauf lundi et jf 10h-18h, dimanche 13h-18h.
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Le petit monde de Watteau
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°90 du 8 octobre 1999, avec le titre suivant : Le petit monde de Watteau