PARIS
Le Musée Carnavalet présente une exposition riche, en documents inédits, sur le regard de l’un des plus grands photographes du XXe siècle sur la capitale.
Paris. Henri Cartier-Bresson (1908-2004) n’a jamais cessé de photographier Paris. Pourtant son nom, à la différence d’Eugène Atget ou de Robert Doisneau, n’est pas associé à la ville bien que nombre de ses photographies soient pourtant passées à la postérité, telles celles de la gare Saint-Lazare ou d’Alberto Giacometti traversant la rue d’Alésia. Le photographe ne s’est intéressé que très tard à cette production. De 1980 à 1984, à plus de 70 ans, il entreprend avec Daniel Arnault, documentaliste à l’agence Magnum, une relecture de ses négatifs afin d’établir une sélection centrée sur Paris. Cela donnera lieu à l’exposition « Henri Cartier-Bresson, Paris à vue d’œil », coorganisée par Jean-Luc Monterosso et Françoise Reynaud dans le cadre du Mois de la photo au Musée Carnavalet, en 2009.
Pour la réouverture du Musée Carnavalet, Anne de Mondenard, responsable du département photographies et images numériques, et Agnès Sire, directrice artistique de la Fondation Henri Cartier-Bresson, reviennent sur le choix d’Henri Cartier-Bresson pour offrir une exposition de plus grande ampleur et libre surtout dans son traitement de l’archive. « Du vivant de Cartier-Bresson, il aurait été impossible d’imaginer une présentation chronologique ou thématique de ses photographies, ou même d’ajouter des éléments de contextualisation. Il ne le voulait pas », explique Anne de Mondenard.
Or le parcours chrono-thématique et la contextualisation régulière des images s’avèrent très instructifs, complétés par le catalogue qui offre divers éclairages inédits sur la place de Paris dans la vie et l’œuvre de Cartier Bresson. En premier lieu, celui du rôle important et peu connu de la commande dans sa production parisienne qui remet en cause l’image du flâneur en balade avec son Leica. Les reportages réalisés pour la presse, publiés ou non, sont nombreux, en particulier entre 1945 et le début des années 1970 ; ceux réalisés entre les années 1936-1938 comportent des photographies non publiées, devenues par la suite des icônes, telles celles des bords de Marne que l’exposition au MoMA de New York fera émerger en 1947. On découvre également diverses photos peu vues ou inédites de Cartier-Bresson sur la Libération de Paris, la mode ou Mai 68, et un focus sur les portraits réalisés dans le cadre de commandes ou celui sur les diverses manifestations suivies par le photographe.
« Paris est le creuset de l’œuvre et son port d’attache qu’il ne cesse de redécouvrir après de longues absences », rappelle Agnès Sire. Le Paris d’Henri Cartier Bresson dit beaucoup de l’homme et de ses choix bien qu’il ait été peu disert sur le sujet. Dès le début, prédominent ainsi les situations décalées, les quartiers et les loisirs des classes populaires tandis que les quais de Seine forment un cadre auquel il revient régulièrement.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°572 du 3 septembre 2021, avec le titre suivant : Le Paris connu et moins connu d’Henri Cartier-Bresson