La Cité des sciences présente une exposition passionnante et ludique sur les dernières découvertes de l’archéologie, remettant en cause au passage nombre de clichés sur l’époque médiévale.
PARIS - « Le Moyen Âge n’appartient pas qu’aux chercheurs » : cela pourrait être la devise des concepteurs de l’exposition « Quoi de neuf au Moyen Age ? » présentée à la Cité des sciences et de l’industrie, à Paris, et ainsi résumée par Isabelle Catteddu, sa commissaire scientifique. Accessible, ludique, pédagogique et fourmillant d’informations et de nouvelles connaissances, l’exposition est une franche réussite.
Prétendre éclairer par les dernières découvertes archéologiques sur près de mille ans d’histoire tenait pourtant de la gageure. La longue allée aménagée par les scénographes en début d’exposition fait d’ailleurs office de rappel chronologique. Cette « galerie du Moyen Âge », présentée sous des ogives rétro-éclairées et illustrées par des diaporamas d’images, pouvait effrayer ceux à qui les dates provoquent des allergies. De la christianisation de l’Empire romain au IVe siècle jusqu’à la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb en 1492, la période considérée est en effet large. Le comité scientifique a résolu le problème en construisant un parcours thématique qui met en avant quelques découvertes et personnages marquants dans des domaines clés réinvestis par l’archéologie contemporaine. « Il fallait dépasser les habituelles bornes chronologiques et multiplier les échelles d’observation », souligne Isabelle Catteddu. Le parcours, très inventif, se compose de cases en bois brut très sobres dans lesquelles le visiteur évolue librement.
Il fallait aussi et surtout s’adresser au jeune public. De ce point de vue, le pari est réussi, grâce à la multiplication de procédés interactifs. Les enfants sont invités à tester l’invention de l’étrier sur un cheval de bois, à comprendre l’art du cloisonné en orfèvrerie grâce à des scoubidous, à se mettre enfin à la place d’un archéologue, armé d’un pinceau et d’une rasette devant un bac à sable numérique. Ailleurs, Hildegarde de Bingen, sainte et docteure de l’Église au XIe siècle, s’adresse au visiteur depuis un castelet de carton-pâte, dans une vidéo à la réalisation soignée.
Les « terres noires »
Pour les plus grands, l’exposition révèle de belles découvertes. Un dispositif numérique informe des nouvelles connaissances sur les « terres noires », une couche stratigraphique sombre datée du VIIIe siècle que l’on retrouve dans les zones habitées de l’époque. Ces terres, longtemps considérées comme la preuve de la pauvreté de l’urbanisation des « âges sombres », sont réinterprétées par la géoarchéologie. Elles témoignent en fait d’un essor économique, la couleur noire venant de la pollution des métaux et des suifs, due à l’activité.
Les objets présentés sont en petit nombre, illustrant simplement mais efficacement le matériel archéologique sur lequel se fondent les archéologues pour leurs recherches. Enfin, un spectacle vidéo d’une durée d’une quinzaine de minutes évoque avec poésie et sur le mode du conte l’essor de la mobilité en Europe et dans le monde au XIIIe siècle. Pèlerins, marchands, nobles et oiseaux de légende prennent vie grâce à une animation élégante. Après le succès de l’exposition « Gaulois, une expo renversante » en 2012, ce nouveau partenariat avec l’Inrap (Institut national de recherches archéologiques préventives) confirme le dynamisme de la Cité des sciences.
En parallèle de l’exposition, la Cité des sciences coédite un « catalogue », véritable œuvre de vulgarisation à destination des plus grands. L’ouvrage se découpe en 10 sections thématiques enrichissant le propos scientifique grâce à une importante iconographie. Une quinzaine de contributeurs livrent ainsi des textes simples et compréhensibles des néophytes. Une rubrique spéciale, intitulée « Le Moyen Âge et nous », absente de l’exposition, donne la parole à des contemporains sur l’inspiration qu’ils puisent dans la période médiévale. Un policier membre d’une confrérie d’entraide, un artiste plasticien, un agriculteur biologique partagent leur sentiment d’héritage et rendent le Moyen Âge particulièrement vivace.
Commissariat scientifique: Isabelle Catteddu, archéologue, ingénieure chargée du recherche à l'Inrap
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Le Moyen Âge d’un œil neuf
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Jusqu’au 6 août 2017, Cité des sciences et de l’industrie, 30, avenue Corentin-Cariou, 75019 Paris, tlj sauf lundi, 10h-18h, dimanche jusqu’à 19h, entrée 12 €. Catalogue, coéd. Cité des sciences/Éditions de la Martinière, 192 p., 29,90 €.
Légende Photo :
Vue de l'exposition « Quoi de neuf au Moyen Âge ? », partie consacrée aux élites : costumes d'Isabelle de Clare et son époux Guillaume le maréchal. © Photo : Ph. Levy/EPPDCSI
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°467 du 11 novembre 2016, avec le titre suivant : Le Moyen Âge d’un œil neuf