Ce douanier-là n’est pas celui que l’on croit. Faisant fi du caractère naïf et primitif de son style, la Kunsthalle de Tübingen offre pour la première fois en Allemagne une rétrospective sur la peinture d’Henri Rousseau et le couronne « passeur de modernité ». Disparu des musées depuis la dernière grande manifestation qui lui fut consacrée en 1984 à Paris et à New York, le Douanier n’a pourtant cessé d’être dans les esprits des historiens.
Sorti de sa réserve, il constitue désormais un lien primordial entre l’art post-impressionniste et celui des avant-gardes. En marge de tous les courants artistiques, autodidacte, régulièrement raillé par la presse et ses contemporains, Rousseau ne fut pas moins présent, presque tous les ans entre 1885 et 1910, aux Salons des Indépendants et aux Salons d’Automne. Ami d’Alfred Jarry, il rencontra Gauguin, et un peu plus tard les époux Delaunay, Apollinaire et Picasso. Le regain d’intérêt actuel pour son œuvre met en lumière son succès commercial et critique durant la première décennie du siècle, déjouant cette image d’artiste reclus, esseulé, véhiculée pendant des années. On redécouvre son goût pour le noir, honni par les impressionnistes, mais qui suscitait déjà l’admiration de Gauguin, et ce rejet des principes perspectifs au profit de surfaces planes superposées. Cet employé modeste, tardivement converti à la peinture, peignait dans un style épuré et volontairement illusionniste de grandes toiles exotiques qui ont fait son succès après avoir essuyé bien des railleries.
TUBINGEN, Kunsthalle, jusqu’au 17 juin.
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Le Douanier tombe le masque
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°523 du 1 février 2001, avec le titre suivant : Le Douanier tombe le masque