Mis à contribution dans le cadre de la célébration nationale des collections des Fonds régionaux d’art contemporain (Frac), le Nouveau Musée présente une exposition remarquablement documentée, bien que fort peu didactique. Architectes déconstructivistes et artistes en prise avec la ville et ses problèmes urbains ou sociaux en constituent les deux pôles fédérateurs.
VILLEURBANNE (de notre correspondant) - Accumulation curieusement désordonnée, l’exposition conçue par Jean-Louis Maubant, Frédéric Migayrou et Pascal Pique ne s’embarrasse pas de préoccupations pédagogiques, pas plus que de l’élémentaire nécessité de préciser clairement les auteurs des œuvres. Ce parti pris nivelle la qualité des pièces exposées car leur apparence, plus que leur intention, s’en trouve privilégiée.
Déconstruire
Malgré ces importantes restrictions, "Artistes / Architectes" s’avère un panorama convaincant des relations qu’entretiennent les architectes avec l’art, comme les artistes avec le bâti.
Mettre en évidence la structure de l’architecture par une énumération des possibles conduit Peter Eisenman à élaborer un volume variable, dont le Building model est successivement exposé sous forme de maquettes et de dessins. Cette option "déconstructiviste" est déclinée par d’autres architectes comme Daniel Libeskind, Hideyuki Yamashita, ou encore Odile Decq et Benoît Cornette. D’autres procèdent de même en appliquant ce procédé à des formes souples, arrondies, comme Elisabeth Diller et Riccardo Scofidio, ou Zaha Hadid.
Artistes dans la ville
Ce désir de décliner un principe prend tout son sens dans la "confrontation" organisée entre Bernard Tschumi et Daniel Buren. L’un comme l’autre entretiennent un rapport à l’architecture conditionné par une règle prédéterminée et adaptée à un objet. Les documents qui présentent la genèse des Deux plateaux, titre exact des fameuses "colonnes" installées au Palais royal, montrent les possibilités insoupçonnées qu’offrent de simples rayures perturbées par des jeux d’eau et de reflets. Bernard Tschumi produit le même étonnement émerveillé avec ses Folies, dérivées d’un cube et destinées au Parc de La Villette.
Si les architectes exposés explorent la forme, d’autres créateurs estampillés artistes s’attaquent à la ville et à ses problèmes urbanistiques. Thomas Schütte produit une cité calquée sur un camp de concentration, pendant que Thomas Struth s’applique à une analyse de l’habitat des grands ensembles. Niek van de Steeg propose, lui, un projet plus concret pour une œuvre qu’il voudrait voir installer sur la Cité internationale construite à Lyon par Renzo Piano, réflexion sur le bâti comme sur sa fonction. Un propos que l’on peut rapprocher de celui de Klaus Jung sur la bureaucratie européenne.
Mais la dichotomie entre artistes et architectes n’est pas une fatalité, comme en attestent les collaborations entre James Turell ou Vito Acconci et l’architecte Robert Mangurian, même si les documents présentés ici sont un peu arides. À ces œuvres austères répond la séduisante anamorphose aléatoire de Pascal Convert, simple dessin sur une cimaise qui, bien qu’économe de moyens, dame le pion aux préciosités un peu vaines des maquettes du groupe Asymptote qui lui font face. Il y a donc à voir et à penser au Nouveau Musée, mais davantage pour l’amateur éclairé que pour le néophyte.
ARTISTES / ARCHITECTES, Nouveau Musée, Villeurbanne, ouvert tous les jours de 13h à 18h sauf le mardi, jusqu’au 20 *janvier, journal de l’exposition 5 F.
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L’artiste, l’architecte et l’art
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°21 du 1 janvier 1996, avec le titre suivant : L’artiste, l’architecte et l’art