Sandra Patron, commissaire de l’exposition, a eu du flair : elle a invité Lubaina Himid à exposer au MRAC de Sérignan avant de savoir que celle-ci serait lauréate du prestigieux Turner Prize 2017.
Méconnue en France, cette artiste britannique est une figure majeure du British Black Arts Movement apparu en Grande-Bretagne dans les années 1980 – à ne pas confondre, comme on peut le faire à la lecture du texte de présentation de l’exposition, avec le Black Arts Movement, un mouvement culturel apparu en Amérique du Nord en 1965 après l’assassinat de Malcolm X, proche du Black Power et actif durant une décennie.
Née en 1954 en Tanzanie d’un père comorien et d’une mère anglaise, Lubiana Himid se revendique comme une artiste femme et noire. Elle n’a cessé de questionner le pouvoir de l’image en lien avec les présences et les identités de la diaspora africaine en Occident. Artiste « engagée », chacune de ses réalisations porte un regard incisif sur l’histoire de l’esclavage, le colonialisme et la sous-représentation des figures africaines dans la culture européenne.
Huit œuvres réalisées entre 1984 et 2016, chacune absolument particulière tant dans ses formes que dans sa matérialité, se déploient dans la vaste salle du rez-de-chaussée du musée. Œuvre phare, Naming the Money (2004) invite le visiteur à déambuler entre des personnages grandeur nature peints en vives couleurs sur du contreplaqué découpé. Les artisans, musiciens, danseurs, serviteurs souvent présents dans la peinture occidentale ont tous ici des visages noirs ou foncés, et un nom suivi d’une histoire personnelle écrite au dos de chaque silhouette.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°713 du 1 juin 2018, avec le titre suivant : L’art engagé de Lubaina Himid