Que peut l’art face aux crises – climatique, économique ou culturelle – contemporaines ? Cette question est au cœur de l’exposition « Survivre ne suffit pas » au Frac Franche-Comté, et justifie que l’événement emprunte son titre à Station Eleven (2014) : dans ce best-seller post-apocalyptique, Emily St.
John Mandel décrit les pérégrinations d’une compagnie de théâtre qui sillonne le Nord-Est des États-Unis pour y jouer Shakespeare et Beethoven aux rares survivants d’une pandémie planétaire. À l’exercice classique de présentation des dernières acquisitions, l’institution bisontine répond ainsi d’une « profession de foi », selon le vœu de sa directrice, Sylvie Zavatta, et entend affirmer la capacité de l’art à donner forme et sens aux remous de l’époque. Ce parti pris donne à « Survivre ne suffit pas » une tonalité politique perceptible dès la première salle, consacrée aux mutations contemporaines du travail. Parmi la trentaine d’œuvres présentées au fil de l’accrochage, une large part aborde des thèmes on ne peut plus actuels : migrations et frontières, rapport à l’autre et à la nature, impact des nouvelles technologies sur l’homme et de l’homme sur l’environnement… Mais l’intérêt de l’exposition tient surtout au fil rouge qui s’y dessine, et éclaire la politique d’acquisition du Frac : depuis 2005, ce dernier construit sa collection autour de la question du temps. Cette thématique est sensible tout au long du parcours de l’exposition à travers un large corpus d’œuvres sonores – que ce soit Les Silences après une question d’Anne Le Troter, les vidéos de Cally Spooner ou d’Anna Holveck, les pochettes d’enregistrements de discours de Marthin Luther King et Kennedy juxtaposées par Sharon Hayes ou les partitions d’Ari Benjamin Meyers…
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°722 du 1 avril 2019, avec le titre suivant : L’art en temps de crise
