Comme Picasso, les impressionnistes font l’objet d’une interminable série d’expositions. Synonyme de manifestation populaire et donc rentable, ce mouvement est en effet accommodé à toutes les sauces : ad nauseam.
Si vous souffrez d’indigestion d’impressionnisme, il ne faut cependant pas vous arrêter au titre de l’exposition du Petit Palais. Visiblement choisi pour sa faculté à séduire le grand public, il ne rend que partiellement compte du propos très novateur de la manifestation, qui retrace l’exil des artistes français outre-Manche de la guerre franco-prussienne à 1904, toutes sensibilités confondues de Doré à Derain en passant par Tissot et Monet. On ne saurait tenir rancune aux commissaires de cette ficelle de communication, tant le travail scientifique accompli est remarquable, tout comme les efforts de scénographie et de médiation pour le rendre accessible au plus grand nombre. Passé maître dans la réhabilitation d’artistes oubliés et de périodes méconnues, le musée creuse ce sillon en explorant un épisode confidentiel mais passionnant à travers un prisme singulier, à mi-chemin entre l’histoire de l’art et la sociologie. Un positionnement stimulant, à l’opposé du paresseux étalage de chefs-d’œuvre dont se contentent parfois les musées, qui restitue finement les axes de recherche promus actuellement par les universitaires. Le parcours, découpé en épisodes thématiques, propose ainsi une enquête sur les réseaux de sociabilité unissant ces déracinés, mais aussi les relations nouées avec leurs confrères britanniques et le marché de l’art local, et, en filigrane, l’impact de l’exil sur leur carrière.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°715 du 1 septembre 2018, avec le titre suivant : L’appel de Londres