La réponse du commissaire Laurent Le Bon

Directeur du Centre Pompidou-Metz et commissaire des expositions « Dada » et « 1917 »

Par Bénédicte Ramade · L'ŒIL

Le 14 décembre 2012 - 391 mots

Bénédicte Ramade : Quel est le cahier des charges d’une bonne exposition ?
Laurent Le Bon : J’appartiens à une génération qui défend le fait qu’une bonne exposition peut aussi être celle qui rencontre son public. Mais je crois toutefois qu’il ne faut surtout pas s’attacher aux chiffres de fréquentation. Aujourd’hui, on a tendance à ne qualifier une bonne exposition que par ces chiffres. Or, si l’on veut prendre ce paramètre en compte, il faut s’attacher à la fréquentation payante journalière, qui me semble être le seul critère fondamental. Car désormais on tend à faire des hit-parades un peu faussés à partir d’indicateurs qui ne sont pas toujours pertinents.

Une bonne exposition est aujourd’hui presque devenue synonyme de grande exposition. Il existe en effet un cahier des charges pour celle-ci : avec une préparation en conséquence, des moyens budgétaires, une équipe, un scénario et une scénographie. Pour moi, grande ou petite, ce qui compte, c’est le mélange de fond et de forme auquel s’ajoute une part de chance. Une bonne exposition doit aussi défricher, ouvrir de nouveaux mondes. Il faut quand même avoir un sujet !

Mais une exposition est comme un précipité chimique : on peut avoir le bon sujet, beaucoup d’argent et des éléments qui ne forment finalement rien. Il faut aussi trouver la bonne scénographie pour mettre en musique ce rassemblement d’œuvres originales, car une exposition est d’abord un parcours sensoriel. D’ailleurs, une bonne exposition est celle que l’on a envie de revoir. La mauvaise exposition, c’est celle dont on imagine le contenu rien qu’à la lecture du titre.

B.R. : Quelle bonne exposition avez-vous vue récemment ?
L.Le.B. : C’est une exposition qui ne touche pas à mon champ d’action pompidolien, il s’agit de « The Sacred Made Real » à la National Gallery de Londres en 2009. Le commissaire, Xavier Bray, a réalisé un tour de force en rapprochant les mondes de la peinture et de la sculpture espagnoles au XVIIe siècle pour en démontrer les influences mutuelles dans une scénographie minimale. J’ai passé un moment magique en ayant l’impression que chaque salle me surprenait. Cette manifestation était très contemporaine, un mélange entre savoir et plaisir, éducation et générosité. C’est un équilibre subtil assez rare. C’est finalement aussi un critère de qualité lorsqu’une exposition arrive à créer la même passion à la fois pour l’expert et le novice.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°653 du 1 janvier 2013, avec le titre suivant : La réponse du commissaire Laurent Le Bon

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