La mélancolie de Fares Cachoux

Des fonds colorés, des silhouettes qui se détachent nettement et des objets ou animaux (l’artiste aime beaucoup les oiseaux) : Fares Cachoux cherche à « dépouiller au maximum » chaque image. Ainsi son portrait d’un migrant montre-t-il une silhouette noire chargée de valises qui avance sur un fond jaune, entourée d’avions et de chars qui l’attaquent. Car la guerre a marqué l’œuvre de l’artiste, né à Homs (Syrie) en 1976. Jouant sur le sens du mot « assad » en arabe, Fares Cachoux a représenté le dictateur syrien sous les traits d’un lion, tout en caricaturant Poutine et Lavrov (ministre des affaires étrangères russe), soutiens du régime. Il a mis aussi en lumière les héros de la révolution populaire (Abdel Basset Al-Sarout) et illustré les bombardements du régime sur Alep et Daraya.

L’artiste cherche pourtant à se détacher de ces séries très célèbres dans le monde arabe, tout en gardant un intérêt pour la politique : en témoigne sa Marianne (2020) sur fond rouge dessinée « après l’assassinat de Samuel Paty », qu’il ressent comme « une attaque contre un idéal français ». De même, sa série sur les pays du Golfe (2023) conserve une approche sociologique derrière l’humour : les jeunes femmes voilées de noir portent des lunettes pop ou des oreilles de Mickey, et les émirs « bling-bling » saturent l’espace visuel pour un effet comique. Comme le souligne la commissaire, Nadine Fattouh, la richesse des noirs sur ces impressions numériques renforce les silhouettes et accentue l’aspect comique. Les dernières séries témoignent d’un intérêt grandissant pour l’écologie et la biodiversité, à l’image d’une des œuvres où un moineau perché sur un caddie rouillé contemple la nature d’où l’homme a disparu (2022). Derrière l’humour de Fares Cachoux transparaît la mélancolie.