Inauguré le 11 mars, l’hôtel des Archives de Bordeaux Métropole, dessiné par l’agence Robbrecht en Daem,
investit judicieusement un site patrimonial.
BORDEAUX - Parce que ses origines remontent à la création de la commune par Aliénor d’Aquitaine à la fin du XIIe siècle et que ses fonds sont exceptionnels, par exemple sur l’histoire des grandes maisons de négoce et plantations coloniales, les Archives de Bordeaux sont l’un des trois plus riches services de France. Après de multiples déménagements, elles s’étaient établies dans un vieil hôtel particulier du XVIIe siècle, mais avec l’accroissement des fonds et le développement d’actions de valorisation de ce patrimoine, le poussiéreux hôtel de Ragueneau n’était plus adapté. En 2006, la Ville décidait de relocaliser cet équipement dans un nouveau bâtiment répondant aux exigences actuelles de conservation et d’accueil des publics. Le choix s’est porté vers un site dans la ZAC de la Bastide, un ancien territoire industriel en pleine reconversion. Tout comme le programme qu’elle accueille, cette parcelle est chargée d’histoire : elle est occupée en partie par une ancienne halle aux farines datant de 1852 qui était desservie par une voie ferrée dont les rails ont été conservés. La SNCF n’existait pas encore et les trains de la Compagnie du chemin de fer d’Orléans pénétraient dans le bâti par deux grands porches.
Travailler avec le plein et non avec le vide
Lauréats du concours, les architectes gantois Paul Robbrecht et Hilde Daem ont pleinement valorisé ce patrimoine à travers un projet formé de l’ancien entrepôt réhabilité et une nouvelle construction qui lui est perpendiculaire, les deux volumes délimitant un parvis extérieur public. Paul Robbrecht explique l’ambiguïté d’un tel programme : « Les archives consistent à travailler avec le plein et non avec le vide, c’est intéressant parce que c’est l’envers de ce que l’on fait normalement en architecture. » Sous la bâtisse de pierre remise à neuf, les magasins de béton brut contenant les documents sont alignés dans la longueur et ils sont superposés selon un décalage en escalier. Haute de quatre niveaux, cette masse émerge en toiture et l’empilement engendre, sous les porte-à-faux, une salle de consultation d’une grande beauté, vitrée vers le parvis. Très haute sous plafond et assez étroite, cette dernière rappelle l’atmosphère d’une cathédrale. La massive voûte de béton est toutefois adoucie par le doublage thermique des murs de pierre faits de lattes de bois dont les tranches colorées créent un jeu cinétique.
Cette mise en scène des magasins de stockage rend palpable le poids de la mémoire sans que celui-ci n’écrase celui qui pénétre dans la salle. À propos des plafonds toujours très travaillés dans les projets de l’agence, Paul Robbrecht déclarait : « J’ai toujours eu une affection particulière pour les plafonds. Ils sont le lieu où l’architecture se révèle entièrement. Le reste d’un bâtiment, le sol, les parois, sont accaparés par la vie. Le plafond évoque le domaine de l’esprit. »
De l’autre côté de la voûte, la superposition décalée permet d’installer des coursives de circulation desservant les espaces de stockage et rappelant l’univers maritime ou industriel.
L’aménagement de l’équipement sur la rive droite de la Garonne ne relève pas d’une seule opportunité foncière, mais il représente un réel enjeu pour ce quartier en mutation. La Ville souhaite faire des archives une matière accessible qui ne soit pas uniquement réservée aux chercheurs. Il s’agit par ailleurs de faire venir les Bordelais dans cet ancien quartier industriel peu fréquenté pour leur faire découvrir l’histoire de la ville et des populations.
Comme l’explique Chrystelle Audoit, directrice générale adjointe des Affaires culturelles Aquitaine, « il s’agit ici d’élever les citoyens en créant d’intéressants événements tels que des concerts sur le parvis ou des expositions comme celle des projets utopiques concernant Bordeaux, lesquels seront autant d’invitations à découvrir un contenu plus élaboré ». Plus que jamais aujourd’hui, il est souhaitable d’aller chercher nos racines, une démarche favorisée ici par l’architecture.
Superficie : 8 800 m2 dont 1 000 mètres carrés pour l’accueil du public
Coût : 14,5 M€ HT
Salle de lecture : 40 places
Salle de conférences : 100 places
Capacité : 18 km et 13 km d’archives conservées
Livraison : mars 2016
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La halle aux farines devient l’hôtel des Archives
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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°455 du 15 avril 2016, avec le titre suivant : La halle aux farines devient l’hôtel des Archives