Avec 1 600 pièces provenant de plus de 55 sites archéologiques, la rétrospective consacrée aux Mayas par le Palazzo Grassi offre une occasion unique de faire le point sur la culture la plus populaire de l’Amérique précolombienne. Longtemps mal connue, cette civilisation a bénéficié, ces deux dernières décennies, d’importantes découvertes, notamment du déchiffrement progressif de son écriture.
VENISE (de nos correspondants) - Au centre de discussions et de polémiques constantes, la recherche historique sur les Mayas a récemment connu un véritable bouleversement. Grâce au déchiffrement de son écriture, une culture jusqu’alors révélée par l’étude des pollens, les analyses ostéologiques ou l’architecture, parle aujourd’hui par les noms de ses rois, les complots à la cour, les alliances matrimoniales et la chronique minutieuse des batailles, des couronnements et des sacrifices. À la place d’une théocratie de prêtres pacifiques, on a découvert des conflits incessants entre les cités-états, groupées autour de deux superpuissances : Tikal et Çalakmul. Au lieu d’une dyarchie entre les souverains et la caste sacerdotale, on a trouvé des rois-chamanes que l’on croyait disparus avec l’établissement des États. Enfin, petite révolution dans notre perception de l’art précolombien, nous connaissons désormais certains noms d’artistes.
Le Roi-Jaguar
Les quelque 1 600 pièces réunies au Palazzo Grassi, prêtées par 40 musées européens et américains, offrent donc non seulement une splendide anthologie de l’art maya mais aussi l’occasion d’aborder, sans parallélismes ethnocentriques absurdes, une culture qui a trop longtemps fait l’objet d’interprétations extravagantes. Les pièces exposées ne se limitent pas à la période classique (300-900). Elles couvrent un espace de temps qui va de 1000 av. J.-C. – montrant ainsi les liens qui rattachent la culture maya aux traditions olmèques et izapas – jusqu’à 1400 ap. J.-C., pendant la période postclassique tardive, généralement ignorée.
Le parcours, articulé en une dizaine de sections thématiques, est ponctué de chefs-d’œuvre, tels le monumental Roi-Jaguar s’habillant pour la bataille, un masque en mosaïque de jade provenant de Tikal, ou encore les architraves de Yaxchilan qui constituent l’un des meilleurs exemples de synthèse entre calligraphie et figuration dans l’art maya.
L’exposition se clôt sur une pièce exceptionnelle, symbole des découvertes des deux dernières décennies : la tête en stuc de Pacal le Grand (603-683), roi de Palenque. Dans cette extraordinaire capacité à conjuguer le naturalisme sobre et presque classicisant du portrait avec les canons de la beauté maya, on ne peut que saluer la main d’un artiste à ranger aux côtés des plus grands sculpteurs de tous les temps.
6 septembre-16 mai 1999, Palazzo Grassi, San Samuele 3231, Venise, tél. 39 41 523 51 33, tlj 10h-19h.
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La civilisation maya renaît sous un autre jour
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°65 du 28 août 1998, avec le titre suivant : La civilisation maya renaît sous un autre jour