Il en est de certaines œuvres qu’elles sont immédiatement repérables. C’est le cas de celles de Pierre Klossowski. Non qu’elles se montrent sous les mêmes et sempiternels traits mais elles procèdent d’une vision si définitive qu’elles se déterminent à l’ordre d’une identité iconique imparable. Ceci est d’autant plus marquant que l’art de Klossowski ne s’exprime, hormis quelques rares sculptures, qu’à travers une pratique, le dessin, et que, dans une relation de sens extrême, pour ce que le dessin est l’enregistrement de la voix haute de la pensée, les œuvres de cet artiste sont l’expression par excès d’une intimité, celle de la psyché. Écrivain, traducteur et commentateur de Nietzsche, Pierre Klossowski doit à l’exemple des maîtres du XIXe siècle, les Ingres et Chassériau, la rigueur d’un dessin laborieusement et savamment élaboré ; à Courbet, il doit la teneur subtile d’un érotisme qui fait basculer chacune des situations qu’il imagine sur le versant d’un refoulé qui ne veut pas toujours s’avouer. Les figures de Roberte, parangon de la femme mûre, et de Baphomet, symbole de l’adolescent immortel, dominent toute l’œuvre de l’artiste comme si elles-mêmes le dominaient. À moins qu’elles ne soient employées par lui qu’aux fins de renvoyer au regardeur l’image de sa propre domination. Les œuvres de Klossowski présentent le plus souvent des images qui sont impudiques, voire outrées, mais paradoxalement elles libèrent l’esprit de sa gangue de chair parce que chacune d’elles est conçue comme un moment d’énergie créatrice. Il y va donc d’une démarche qui opère d’abord et avant tout en qualité de salubrité sémantique. « Klossowski, l’énoncé dénoncé » comme le formule judicieusement Bernard Lamarche-Vadel.
VENCE, Galerie Beaubourg, jusqu’au 19 juin. Pierre Klossowski est ici présenté face à une jeune artiste, Béatrice Cussol.
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Klossowski, en toute intimité
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°504 du 1 mars 1999, avec le titre suivant : Klossowski, en toute intimité