Le graffeur a investi une chapelle, pour une exposition qui devrait être le prélude à une forte présence du « street art » dans le futur musée de la ville.
MONTPELLIER - Record de vente chez Artcurial, Légion d’honneur, entrée d’une toile dans les collection de l’Assemblée nationale, déclinaison en timbre, expositions multiples…, ces derniers mois, le pionnier du street art JonOne a été sous les feux des projecteurs. À Paris mais aussi à Montpellier où, appelé en urgence pour remplacer Joana Vasconcelos, l’artiste américain a mis les bouchées doubles pour ouvrir l’exposition « Above and below » présentée au Carré Sainte-Anne.
JonOne a habilement relevé le défi et entre en résonance avec cette chapelle désacralisée. Aux vitraux du monument répond une explosion de couleurs vives sur des toiles grand format envahies par de longues coulures, des éclaboussures projetées à coup de dripping, ou des calligraphies héritées de ses premiers graffitis dans son Bronx natal. Face à l’histoire et au caractère monumental du lieu, une installation XXL déploie des formes aériennes en Plexiglas de couleur, un enchevêtrement de signes qui semblent s’interroger sur la présence d’une figure sacrée. Sans toutefois, même à suivre les flèches, figures fétiches de l’artiste, obtenir une réponse… Les variations de la lumière qui filtre au travers des vitraux et émanant de l’œuvre centrale achèvent de donner une cohérence à l’ensemble.
L’artiste, qui a délaissé la rue comme terrain de jeu, et a fait son entrée sur les cimaises des galeries et institutions, cédant ses œuvres contre des sommes coquettes, se sent-il toujours appartenir au street art ? « Le street art est mon école, j’ai su évoluer depuis », réplique-t-il astucieusement. Lui se décrit plutôt comme un « peintre graffiti expressionniste abstrait », et puise ses influences dans l’œuvre de Jackson Pollock, de Joan Mitchell ou de Robert Motherwell – dont il n’a pourtant pas la puissance –, ou encore de Miró ou Matisse.
Un art populaire
L’exposition de cet artiste qui invite à s’interroger sur les frontières entre art contemporain et art urbain devrait être le prélude à une présence grandissante du street art à Montpellier. Le commissaire du projet, Numa Hambursin, ex-galeriste de la ville, déplore aujourd’hui le peu de place accordé au mouvement par les musées. « Le street art ne passe pas la porte des institutions, sauf sous des formes éphémères, pas dans les collections », explique-t-il. « Les institutions appellent des graffeurs pour faire une performance, et après, lavent immédiatement le mur pour le remettre en blanc », s’amuse JonOne de son côté. Mais ce projet au Carré Sainte-Anne annonce une politique active en faveur du street art menée par le futur musée d’art contemporain, qui devrait ouvrir ses portes à l’été 2018. En effet, les rênes de l’établissement sont confiées à Michel Hilaire, directeur du Musée Fabre, et au même Numa Hambursin, qui se promet de faire entrer le street art dans les murs du musée, au travers d’expositions mais aussi d’acquisitions. Celui qui confesse s’être tardivement intéressé au mouvement, suivant en cela le dédain avec lequel la majorité de la sphère de l’art contemporain le considère, tempête : « Cela passionne les jeunes, on ne peut pas faire comme si cela n’existait pas ! Et est-ce que c’est parce que c’est à la mode qu’il ne faut pas regarder ? » Mais avant qu’un art populaire ne gagne ses lettres de noblesse, l’eau peut couler un certain temps sous les ponts.
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JonOne réveille le « street art » à Montpellier
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Abonnez-vous dès 1 €Jusqu’au 1er novembre, Carré Sainte-Anne, 2, rue Philippy, 34000 Montpellier, tél. 04 67 60 82 11, du mardi au dimanche 10h-13h, 14h-18h, entrée libre.
Légende Photo :
JonOne, One Very Important Thought, 2015, acrylique sur toile, 210 x 210 cm. © Photo : Gwen Le Bras.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°441 du 18 septembre 2015, avec le titre suivant : JonOne réveille le « street art » à Montpellier