S’il maîtrise parfaitement les techniques de la céramique et les jeux de hasard entre le feu et la lumière, ne vous méprenez pas : Johan Creten est avant tout un artiste, libre, inspiré et inspirant.
Ce créateur nomade, né en 1963, a horreur d’être réduit à son activité de « céramiste », enfermé dans une case, ou plutôt dans une cage, à l’image du bestiaire fascinant qu’il présente à La Piscine. Entrée en matière phénoménologique, une chauve-souris géante nous accueille au seuil du musée, invitant le spectateur à sentir la matérialité de l’œuvre et à laisser une trace sur cette sculpture, aux côtés du poème de Colin Lemoine, commissaire de l’exposition et collaborateur du magazine L’Œil, gravé dans le bronze. L’art peut-il faire bouger les murs ? Sans doute. C’est en tout cas ce que suggère ces bas-relief, œuvres mobiles montées sur roulettes, représentant des insectes inquiétants en dialogue avec les sculptures des collections. Réalisées en 2001 en collaboration avec des jeunes de banlieue, ces céramiques miniatures interrogent la part de déterminisme social chez l’homme. Revisitant aussi bien un imaginaire mythologique que l’univers des Fables de La Fontaine, l’artiste belge explore les frontières poreuses de l’animalité à travers 17 sculptures inédites, noyau de l’exposition. Des bêtes à la fois imposantes, sauvages et attirantes semblent pourtant prisonnières, prises au piège de leur socle artificiel. Une mouche morte, à la silhouette féminine offerte, un mystérieux hippocampe, gardien des portes de l’enfer, un hérisson pleurant son innocence… Autant de métamorphoses qui reflètent diverses facettes du visage humain. Peu à peu, l’animal semble disparaître sous nos yeux, comme enseveli par l’émail débordant de couleurs, et s’effacer au profit de formes minérales pures, de surfaces rugueuses et scintillantes. Ces fantasmagories trompeuses donnent à voir un bestiaire, bien plus humain qu’animal, oscillant entre la ferme orwellienne et le sanctuaire de l’arche de Noé.
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Johan Creten, homme "à Fables"
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°754 du 1 mai 2022, avec le titre suivant : Johan Creten, homme "à Fables"