Joan Miró versus Henri Matisse

Le choix d’Henri Matisse (1869-1954) et de Joan Miró (1893-1989) par le commissaire Rémi Labrousse – universitaire à qui l’on doit d’importantes publications sur ces deux peintres – étonne, tant l’œuvre de Matisse est cantonnée dans le registre du bonheur tandis que celle de Miró est secouée par des violences érotiques. À l’encontre de ces lieux communs, la présentation du Musée Matisse, qui collabore avec la Fondation Miró de Barcelone, suggère par petites touches d’éventuelles passerelles entre ces deux créateurs. Alors que le quart de siècle qui sépare le peintre espagnol de son aîné ne facilite pas leur rencontre, Labrousse montre que, malgré la différence d’âge, les deux artistes affichent un grand respect pour leurs œuvres respectives. Si les connivences visuelles ne sont pas toujours évidentes – hormis les résonances entre les magnifiques livres illustrés qu’ils réalisent –, l’hypothèse avancée par Labrousse est audacieuse. Selon lui, Matisse et Miró s’engagent dans la déconstruction de la peinture. À une différence près : quand le premier fait appel au système décoratif pour décortiquer le code pictural de l’intérieur, le second s’attaque frontalement à la représentation. Pour reprendre le sous-titre de l’exposition niçoise, ils s’aventurent au-delà des images.