Depuis longtemps, Maïthé Vallès-Bled pensait à ce « projet fou », comme elle le qualifie elle-même : proposer à des poètes du monde entier d’écrire un texte en lien avec un tableau choisi dans les collections du Musée Paul Valéry.
Le résultat est à la hauteur de l’ambitieux projet. Tous les espaces du musée sont rythmés par les résonances entre des textes écrits pour l’occasion par deux cent trente-quatre poètes provenant de quatre continents et de trente-cinq pays, de la Côte d’Ivoire à l’Argentine en passant par le Québec, la Suisse ou le Kosovo, et deux cent cinquante tableaux aussi variés que peuvent l’être des œuvres allant du XVIIIe siècle à aujourd’hui. La découverte de l’exposition n’est pas facile. Il peut vite apparaître vertigineux de lire chaque texte puis de regarder chaque peinture en relation plus ou moins évidente avec le « poème ». À chacun des visiteurs de faire ses propres découvertes, forcément subjectives. Pour notre part, un long texte de Jean-Luc Parant en regard avec Mer calme à Palavas, peinte en 1857 par Gustave Courbet, nous a plongé dans de captivantes réflexions : « Car si nous avons eu des yeux pour tout voir, des yeux pour voir l’infime autant que pour voir l’infini, nos yeux ne s’ouvrent toujours pas devant tout. » Une toute autre musique est proposée par Pierre Tilman, en écho avec Fernande, une toile de Robert Combas de 1992 : « Tandis que les rouges pêchent à la ligne, les bleus tendent des cordes de guitare, tandis que les noirs passent à la ligne, les oranges branlent bas de combat. »
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°716 du 1 octobre 2018, avec le titre suivant : Ivre de mots et de peintures