Isabelle Bardiès-Fronty - Conservateur en chef au Musée de Cluny

L'oeil : Pourquoi avoir choisi de présenter des œuvres issues d’époques et de foyers différents ?
Isabelle Bardies-Fronty :Les collections et le site de Cluny, à la fois antique et médiéval, se prêtent parfaitement aux expositions transchronologiques. Elles s’inscrivent d’ailleurs totalement dans notre propos : démontrer que le Moyen Âge ne constitue pas une rupture brutale avec l’Antiquité, mais, au contraire, une période de transmission essentielle de son héritage ; ainsi qu’une époque d’échange avec les autres cultures, notamment avec l’Orient.

L'oeil : Le jeu est un univers très vaste, quels ont été vos critères de sélection ?
I.B.-F. : Avec Anne-Elizabeth Dunn-Vaturi, co-commissaire de l’exposition, nous souhaitions raconter l’histoire de jeux de plateau des origines jusqu’à l’aube des Temps modernes. C’est-à-dire, les jeux qui nécessitent un support et des accessoires spécifiques et dont la pratique est régie par des règles. Les jeux de plein air ainsi que les jouets ne sont donc pas abordés dans l’exposition.

L'oeil : Les jeux sont-ils des objets d’art ?
I.B.-F. : Les jeux commandités par les puissants ont fait l’objet d’un traitement somptuaire. Nous avons choisi des jeux qui se distinguent par leur ambition artistique, tant par la qualité de leur décor que par la nature précieuse de leurs matériaux. Des prêts extrêmement généreux viennent appuyer notre propos tels que le spectaculaire jeu dit « de Charlemagne » de la BnF, le superbe plateau en ivoire et ébène du Bargello ou encore l’exceptionnel jeu d’Ur en marqueterie de lapis-lazuli, de coquillage et de corail, conservé au British Museum.