Cornelius Gijsbrechts, maître illusionniste du XVIIe siècle, demeure un personnage obscur. Bien que Copenhague lui consacre aujourd’hui sa première exposition personnelle, on sait très peu de choses du mystérieux artiste qui a enchanté la cour du Danemark par ses extraordinaires trompe-l’œil.
COPENHAGUE - Peu d’éléments biographiques nous sont parvenus : les registres de la cour royale du Danemark décrivent Gijsbrechts comme “le peintre du Brabant”, et Nobertus, son second prénom, laisse penser qu’il était catholique. On sait qu’en 1664, il se trouvait à Regensburg, qu’il a ensuite travaillé à Hambourg et est arrivé à Copenhague en 1668. C’est pendant son séjour de quatre ans à la cour du Danemark qu’il a réalisé ses plus belles œuvres. Son chef-d’œuvre, exécuté en 1670 pour la Kunstkammer royale, représente un chevalet avec une nature morte encadrée, une palette, des pinceaux et le revers d’une toile posée au sol et appuyée contre un mur. Placé dans le coin d’une pièce et peint sur un panneau de chêne, il donnait aux invités du roi l’impression de se trouver véritablement devant un chevalet et son tableau. Puis Gijsbrechts est parti pour Stockholm et enfin Breslau, où l’on perd sa trace en 1675. La plupart de ces renseignements viennent de bribes d’information contenues dans ses tableaux. Par ailleurs, de minuscules autoportraits en trompe-l’œil le représentent en respectable gentleman à la moustache élégamment recourbée.
Le peintre a ensuite sombré dans l’oubli et son travail n’a été redécouvert que dans la seconde moitié du XXe siècle. L’exposition de Copenhague était en préparation depuis près de trente-cinq ans. En 1965, le Statens Museum for Kunst, qui venait de faire nettoyer le Trompe-l’œil au chevalet et nature morte aux fruits, a décidé de restaurer les œuvres de Gijsbrechts. Les dix-neuf peintures du musée constituent la seule grande collection de l’artiste. Elles sont au cœur de l’exposition, accompagnées de prêts importants et de peintures en trompe-l’œil réalisées par ses contemporains.
Prochaine étape, Londres
Après Copenhague, l’exposition sera présentée dans une forme légèrement différente à la National Gallery de Londres, du 2 février au 1er mai. Il est aussi question d’une étape au County Museum of Art de Los Angeles. À leur retour au pays, le Statens Museum for Kunst devra décider du sort de deux œuvres qui décoraient les appartements privés du prince consort du Danemark : Peintures, outils de l’artiste et nappe à motif de fleurs dans l’atelier du peintre, au palais d’Amalienborg, et Trompe-l’œil aux pistolets au palais Fredensborg. On dit que le Prince attend impatiemment le retour des tableaux, commandés par la famille royale il y a trois siècles. S’ils sont conservés dans ces palais depuis 1670, le musée en est légalement devenu propriétaire en 1849, et tous deux font partie d’une paire dont les pendants se trouvent depuis longtemps dans ses collections. Devant le succès que connaît l’exposition de Copenhague, le conservateur Olaf Koester aimerait pouvoir continuer à les présenter au public. Cent cinquante ans après le transfert de propriété, sans doute serait-il opportun de formuler une requête polie auprès du prince Henri.
Jusqu’au 30 décembre, Statens Museum for Kunst, Sølvgade 48-50, Copenhague, tél. 45 33 91 21 26, tlj sauf lundi 10h-16h30, mercredi 10h-21h.
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Illusion parfaite
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°94 du 3 décembre 1999, avec le titre suivant : Illusion parfaite