HYÈRES
La collection municipale a enfin trouvé un lieu définitif d’exposition. L’ancienne succursale de la Banque de France, au centre de la ville varoise, offre un cadre élégant et un bel espace au Musée des cultures et du paysage.
Hyères (Var).« Les Hyérois vont redécouvrir leur musée municipal », se félicite François Carrassan, adjoint au maire de la ville d’Hyères chargé de la culture. Depuis presque vingt ans, en effet, la collection municipale, comprenant 8 000 objets dont 1 200 relatifs aux beaux-arts, était entreposée dans un garde-meuble. C’est dire que toute une génération a pu croire qu’il n’existait pas de musée municipal alors même que la collection bénéficiait du label « Musée de France ».
Créé en 1883 à partir des collections ornithologiques, entomologiques, archéologiques et géologiques de trois érudits locaux, le musée-bibliothèque, constamment enrichi de dons et d’achats, a connu plusieurs localisations dans la ville jusqu’à ce que la dernière, la Cité administrative, soit transformée en médiathèque en 2000. En 2002, le musée fermait. À cette époque, la Banque de France vendait certaines de ses succursales : la Ville décida d’acquérir celle d’Hyères, datant de 1925, dans le but d’y installer ses collections. Mais le projet n’a pu réellement être lancé qu’après 2014 et le chantier a démarré en 2017, confié à l’agence Prospective & Patrimoine de l’architecte Bruno Donzet, sous la supervision d’Alain-Charles Perrot, architecte en chef des Monuments historiques. Une extension a pris la place de l’ancienne terrasse donnant sur le jardin qui a été réaménagé pour donner un prolongement aux orientations du nouveau Musée des cultures et du paysage.
Le bâtiment a conservé sa mosaïque Art déco, ses cheminées, quelques-unes de ses boiseries et sa verrière réalisée sur le même modèle que celle de la villa Noailles. L’ancien appartement du directeur de la succursale bancaire accueille les collections permanentes – deux cents objets sont présentés – tandis que l’ancienne salle des guichets a été transformée en espace d’exposition modulable offrant 70 mètres linéaires d’accrochage.
L’ancienne salle des coffres est restée en l’état, ce qui permettra la présentation d’installations dans une jolie scénographie. Le patio du premier étage célèbre la culture des orangers en accueillant notamment Flânerie à l’orangeraie (2020), une commande au plasticien Mickael Obrenovitch réalisée avec le potier Serge Moiselet. L’ancienne salle à manger est dévolue à l’accrochage de photographies (en ce moment, celles de Bernard Plossu) de la riche collection du musée acquise en relation avec les résidences de photographes organisées à la villa Noailles. Autre lien avec ce célèbre bâtiment hyérois, la sculpture Monument au chat d’Oscar Dominguez (1953), qui a été retirée des jardins de la villa lors de la restauration de celle-ci, trône désormais dans le jardin du musée.
Outre celle des partenariats avec d’autres institutions pour le dépôt d’œuvres, la directrice du musée, Sophie Deshayes, suit plusieurs pistes visant à enrichir ses collections. Elle envisage par exemple l’achat d’œuvres en rapport avec l’environnement et de passer commande à des designers sonores. La Banque, Musée des cultures et du paysage, devrait rapidement prendre sa place parmi les institutions incontournables du littoral méditerranéen.
Paysages ensoleillés pour l’exposition inaugurale
Exposition. Consacrée à l’impact du Midi sur les peintres entre 1850 et 1950, l’exposition inaugurale réunit soixante-six œuvres de cinquante artistes prêtées par une quarantaine de musées. Sophie Deshayes a fait appel aux musées du territoire, mais aussi aux collections des musées nationaux (le Louvre, Orsay, Pompidou) et départementaux ou municipaux partout en France. La présentation, chronologique, montre comment les différents mouvements artistiques ont interprété la lumière particulière de la région et la manière dont celle-ci, en retour, a changé la vision des peintres. Il faudra attendre la fin du XIXe siècle pour que les peintres provençaux affrontent enfin la lumière aveuglante du Sud, ce dont témoignent Cannes, vue de La Napoule d’André Gouirand (1890, voir ill.) et Soleil et Poussière d’Édouard Crémieux (1900). Avec Les Roches rouges à Agay (1901), le Marseillais René Seyssaud atteint en tête l’étape du fauvisme, bien avant la « cage aux fauves » du Salon d’automne de 1905. Entre-temps, Auguste Renoir est venu à Marseille, en 1882 auprès de Paul Cézanne et en 1883 avec Claude Monet. Ni Cézanne ni Monet ne sont présents à l’exposition d’Hyères, mais Renoir, qui s’est fixé sur la Côte d’Azur en 1898, l’est avec La Ferme des Collettes (1915). Les fauves sont largement représentés – Henri-Edmond Cross, Henri Manguin, Charles Camoin, Auguste Chabaud sont nés dans le Midi ou y ont acheté une résidence. Le Phare d’Antibes de Paul Signac (1909) est placé à côté de Saint-Tropez, vue de la citadelle (1909), une toile divisionniste de Francis Picabia. Paysage à l’Estaque de Raoul Dufy (1908) est cézanien tout comme Paysage à Collioure d’André Masson (1919). Et l’on retrouve Dufy dont Jardin public à Hyères (1952) célèbre les palmiers de la ville. À la fin du parcours, Soleil jaune de Marc Chagall (1958), Les Pigeons de Pablo Picasso (1957) et Paysan à l’olivier d’Édouard Pignon (1950) magnifient trois nuances de la lumière méditerranéenne, de la plus douce à la plus âpre.
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Hyères montre ses trésors à la Banque
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°580 du 7 janvier 2022, avec le titre suivant : Hyères montre ses trésors à la Banque