Trente années de création du graphiste militant sont exposées à la Maison d’art Bernard-Anthonioz à Nogent-sur-Marne.
Nogent-sur-Marne (Val-de-Marne). Rares sont les expositions dans lesquelles on entre le sourire aux lèvres. Celle concoctée par le graphiste Gérard Paris-Clavel, 74 ans, déployée à la Maison d’art Bernard-Anthonioz, à Nogent-sur-Marne, en est une. Dès la cour de l’institution en effet, le visiteur est accueilli par un panneau oblong sur lequel se détache en larges lettres la phrase suivante : « En chantier de vous connaître ». On l’aura compris, l’homme joue avec les mots comme il respire et ce depuis un demi-siècle : « Il faut travailler le jeu, affirme-t-il. Si l’on n’a pas le jeu, la lutte est désespérante. » Cette passionnante exposition en regorge. Intitulée « Avec », elle rassemble une large sélection de travaux datant de ces trente dernières années : affiches, œuvres d’art, objets, documents graphiques, livres, photographies, films, etc. Il s’agit « non [d’]une rétrospective, plutôt [d’]une proposition », tient à préciser le graphiste. Ayant suivi les cours du célèbre affichiste polonais Henryk Tomaszewski, à Varsovie, Paris-Clavel cofonda à Paris le groupe Grapus, lequel s’épanouit dans les années 1970, après avoir porté haut la créativité graphique de Mai-68.
Gérard Paris-Clavel se veut artisan avec, dans sa boîte à outils, des images et une palanquée de caractères typographiques. À la fois artiste et militant, il triture les mots pour mieux dire les maux. Objectif : « Énoncer un malheur en montrant la part de bonheur perdu. » Lors des manifestations sont placardés ainsi sur la voie publique quelques-uns de ses slogans, dont le fameux « Utopiste debout » ou cette expression non moins notoire conçue en ôtant à dessein la première lettre du mot « grève » pour créer le savoureux « Rêve générale ». Paris-Clavel sait tirer parti de la puissance intrinsèque des vocables. C’est leur « poids » qui, souvent, générera « le choc des photos ».
Dans une vitrine sont rassemblés des autocollants d’opinions, dits « papillons », que les manifestants exhibent habituellement sur leurs vêtements : « Ces autocollants sont portés sur les corps, souligne le graphiste. Les manifestants sont des “corps-porteurs”, des “colporteurs” », glisse-t-il, sans pouvoir empêcher le calembour…
Dans une salle se déploie une sorte de bibliothèque contenant tout son travail d’édition. « C’est comme cela que je gagne ma croûte, explique-t-il, avec l’édition. Les affiches, ça n’existe plus beaucoup aujourd’hui. » Figurent à son actif la couverture de l’ouvrage La Misère du monde du sociologue Pierre Bourdieu, publié aux Éditions du Seuil (1993), ou la « une » du no 178 du magazine Les Inrocks, avec ce même Bourdieu en rédacteur en chef invité. Paru en 1998, peu avant Noël, elle s’intitule… « Joyeux Bordel ». On ne se refait pas.
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Gérard Paris-Clavel, un trait acéré
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°487 du 20 octobre 2017, avec le titre suivant : Gérard Paris-Clavel, un trait acéré