L’amour fuit. L’amour fuit un corps qui l’encercle, l’enserre, l’entrave.
Ce groupe en plâtre est issu de la Porte de l’enfer, inépuisable réservoir des figures rodiniennes – Le Penseur et Le Baiser ont également été engendrés sur ces deux gigantesques vantaux, commandés en 1880. C’est peu dire qu’Auguste Rodin joue avec les lois newtoniennes : s’inspirant de L’Enfer de Dante, le sculpteur entremêle acrobatiquement la femme et l’homme afin de défier la pesanteur et de former une chorégraphie inquiète quoique séraphique, « belle de cette inétreignable beauté qu’ont les chimères que nous poursuivons et les rêves que nous n’atteindrons jamais » (Octave Mirbeau). Dépôt du Musée Rodin, cette œuvre resplendit non loin des Bourgeois de Calais.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°735 du 1 juillet 2020, avec le titre suivant : “Fugit Amor”, de Rodin