Feuilles d’amateurs

Une centaine de dessins français du XVIIIe siècle est actuellement présentée au Metropolitan Museum.
Si une cinquantaine lui appartient en propre, d’autres sont des prêts « confraternels » du Cooper-Hewitt National Design Museum, de la Frick Collection ou de la Pierpont Morgan Library. Quarante feuilles appartiennent à des amateurs, parmi lesquels M. Felix Rohatyn, ambassadeur actuel des États-Unis en France, et sa femme. L’exposition a donc le caractère d’un hommage délicat aux amateurs new-yorkais dont les prêts rivalisent avec les dessins appartenant aux musées. C’est d’ailleurs d’une collection privée, restée anonyme suivant la volonté de son propriétaire, que les organisateurs ont tiré l’un des plus beaux dessins, Femme assise se tournant vers la gauche et tenant un éventail de Watteau. Depuis quelques années, le département des dessins du Metropolitan Museum a su alterner acquisitions archi-célèbres et quelques excursions hors des sentiers battus. Il y a bien sûr de beaux Fragonard, un David des plus admirables, La Mort de Camilla, mais aussi des dessins bien choisis de Pater, Restout et Labille-Guillard. Même la Frick Collection, qui ne s’occupe pas souvent de dessins, français ou autres, s’est distinguée dernièrement en achetant le superbe Portrait du comédien Baptiste Aîné par Greuze. Le XVIIIe siècle français a tout pour plaire aux amateurs actuels. Il va sans dire que l’enrichissement et l’avenir du Metropolitan, comme celui du Louvre, dépendent en partie du goût et des ressources des collectionneurs de notre temps. Cette exposition prouve qu’il y a actuellement à New York un noyau d’amateurs qui se passionnent pour le dessin. Pour cela, les conservateurs ont beaucoup fait, les marchands spécialisés aussi. Le dessin français est heureusement inépuisable. Mais ce n’est pas seulement le budget qui mène la danse, c’est l’œil.