"Femme assise sur la plage", de Picasso

Le 10 février de cette année, il peint une Femme assise sur la plage, dos tourné vers la mer, se grattant un pied. Femme qui réapparaît huit jours plus tard dans une autre composition, la Grande baigneuse au livre, absorbée dans la lecture de son livre. La figure est sculpturale, minérale même – on parle de « chosification » ou de « pétrification ». Ce n’est plus tout à fait Marie-Thérèse Walter, avec laquelle la relation se termine, ni vraiment Dora Maar, rencontrée quelques semaines plus tôt. Dans l’histoire de l’art, ces tableaux font le lien entre les Baigneuses de Cézanne et les études de figures au pied d’une crucifixion de Bacon (1944), sans y faire explicitement référence. Mais comment ne pas penser à la sculpture de Jean Arp ou de Henry Moore ? Pierre Daix voit dans la Femme assise sur la plage« un rêve de sculptures d’autant plus aigu qu’à la suite de la séparation avec Olga, [l’atelier de] Boisgeloup [lui] est interdit »… Car si l’« on ne sait que peu de chose à son sujet », précise Sylvie Ramon, la directrice des musées de Lyon, on sait que Picasso garda la toile auprès de lui et la prêta pour sa grande rétrospective de 1955 au Musée des arts décoratifs. Comment est-elle ensuite entrée en possession de l’actrice et collectionneuse Jacqueline Delubac ? Possiblement par la Galerie Louise Leiris, comme tendrait à le faire penser l’étiquette collée au dos du châssis… Le tableau est entré dans la collection du Musée des beaux-arts de Lyon en 1997, avec l’essentiel de la collection Delubac, à laquelle le musée a consacré une exposition en 2014. Avec La Fuite en Égypte (1657) de Poussin, il est assurément depuis le chef-d’œuvre du musée.