XVIIe

Dessins préparatoires du Siècle d’or

Par Vincent Noce · Le Journal des Arts

Le 26 avril 2017 - 531 mots

La Fondation Custodia fait une présentation érudite des dessins préparatoires des peintures hollandaises.

PARIS - Pieter Saenredam s’est attaché à peindre les églises hollandaises vidées de leurs peintures, sculptures et tableaux d’autel par la Réforme. Il fut le premier à rendre compte de ces architectures dépouillées, qu’on appelait des « perspectives ». En 1635, il a dessiné des études de la nef et de l’orgue de Saint-Bavon, qui allaient lui servir pour une représentation de grande taille peinte douze ans plus tard. Ces dessins, à main levée, illustrent tout son talent. Il les annotait de corrections et les quadrillait à la sanguine pour les reporter sur ses tableaux. Dans la composition finale, il pouvait allonger les ogives ou ajouter des enfants en train de jouer pour rendre davantage la monumentalité de ces abstractions de pierre.

Une exposition remarquable à la Fondation Custodia, montée avec la National Gallery de Washington, permet de voir comment les artistes de l’époque passaient du dessin à la peinture. Servie par une présentation claire et didactique, elle présente une vingtaine de tableaux et une centaine de feuilles. Le dessin était fondamental à la réalisation de l’œuvre dans les Provinces-Unies. Même les caravagesques locaux cédaient à cette tradition, à l’encontre de l’inspiration venue de Rome. Chacun avait cependant sa propre technique. Reconstituer ces étapes n’est pas aisé car la plupart de ces feuilles ont disparu au fil des temps. La Fondation expose ainsi deux carnets de croquis, dont il reste moins de dix exemplaires dans le monde.

Une constante semble être cependant la répétition de motifs dans différentes compositions. On voit ainsi Hendrick Avercamp préparer des portraits de personnage qu’il insère ensuite dans ses scènes hivernales, Dirck Hals esquisser à l’huile sur papier un homme assis en train de fumer la pipe qui se retrouvera dans ses scènes de taverne avec une pipe ou un violon, Jacob Van Ruisdael reprendre une ruine ou un bosquet, Abraham Bloemaert intégrer une magistrale étude de saules dans une scène biblique. L’utilisation de la craie blanche ou du lavis, parfois sur papier coloré, servait aussi à définir les atmosphères, par exemple de scènes nocturnes.

Quelquefois, les artistes travaillent ensemble sur la même composition –  chacun avec sa spécialité –, étudient le même modèle selon des angles différents ou reprennent un motif dessiné par un confrère. Certains, tels Adriaen Van de Velde ou Nicolaes Pietersz Berchem, réalisaient des contre-épreuves, appliquant un dessin à la sanguine ou à la pierre noire sur une feuille en frottant l’original. Caspar Netscher, lui, avait la particularité de réaliser des études qui étaient de véritables portraits de mains, reportant le nom des dames qui lui avaient servi de modèle sur la feuille. Tous les dessins n’étaient pas préparatoires à la peinture. Le même artiste reproduisait ainsi ses compositions sur feuille, pour en conserver le souvenir dans l’atelier, pour lui-même ou ses élèves. L’exposition donne un rare exemple dans lequel Rembrandt reprend un personnage dessiné pour l’assistance du prêche de saint Jean Baptiste, mais lui préférait peindre directement à même le tableau, réservant ses feuilles à la gravure ou à l’instruction de ses élèves.

La Fondation accueille en même temps un superbe échantillon d’une centaine de dessins allemands de l’exceptionnelle collection d’Hinrich Sieveking.

Du dessin au tableau au siècle de Rembrandt

Jusqu’au 7 mai, Fondation Custodia, 121 rue de Lille, 75007 Paris.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°478 du 28 avril 2017, avec le titre suivant : Dessins préparatoires du Siècle d’or

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