Le Fonds régional d’art contemporain de Champagne-Ardenne présente actuellement deux œuvres récentes d’Aernout Mik. Avec Parks, et surtout Flock, l’artiste hollandais confirme sa maîtrise d’un genre qui dépasse par l’absurde toute narration et produit par ses images des résonances physiques.
REIMS - Si les vidéos d’Aernout Mik s’apparentent à des énigmes par les sujets et les actions auxquelles elles s’attachent, elles se révèlent être des évidences par les impressions physiques qu’elles provoquent. Parks (2002), une des deux œuvres du Hollandais actuellement présentées par le Fonds régional d’art contemporain (Frac) de Champagne-Ardenne, produit un haut-le-cœur redoutable. Suspendue à un long mat, la caméra opère un travelling vertical d’un nouveau genre, mouvement qu’accompagne une petite foule hystérique sautillant autour d’un arbre. Cette transe collective s’opère dans un entre-deux complet. Le coin de nature qui sert de décor semble être à la lisière d’une ville, les personnages ont des allures de marginaux, et deux posters étranges placardés reproduisent le visage d’un adolescent à la manière d’un avis de recherche. Comme souvent chez Mik (lire le JdA n° 125, 13 avril 2001), impossible de dire qui fait quoi et pourquoi.
Flock, une de ses dernières œuvres, coproduite par le Frac, n’échappe pas à cette incertitude. Elle en fait même une valeur qui nécessite des moyens proportionnels à la maîtrise technique et visuelle de l’ensemble. Ici, le flottement est assuré tant par la multiplication des points de vue que par une mise en scène dans un décor improbable : un hangar ou la cale d’un bateau agrémenté de quelques parcelles de végétaux et habité par des chèvres. Au sein de cette arche, des personnages, majoritairement d’origine asiatique, prennent des allures de boat people bibliques. Deux écrans juxtaposés et une variété de mouvements, zooms, gros plans et autres déplacements de focale fournissent au spectateur une forme d’omnipotence visuelle dans une scène qui ne raconte rien de plus que son étrangeté. Seule porte de sortie vers l’extérieur, un des hommes communique en vase clos, écoutant sa radio pendant qu’il parle dans son téléphone portable. Les hommes s’activent en jouant aux cartes, se disputent, dorment, tandis que les chèvres passent ou tremblent. Campée par un robot, l’une d’entre elles rajoute une dose de soupçon dans ce qui ressemble à une version humanitaire et contemporaine de la Genèse. Reste donc à interpréter les Textes.
Jusqu’au 23 mars, Le Collège/Fonds régional d’art contemporain Champagne-Ardenne, 1 place Museux, 51100 Reims, tél. 03 26 05 78 32, tlj sauf lundi, 14h-18h, mercredi et vendredi 12h-18h.
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Des chèvres et des hommes
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°164 du 7 février 2003, avec le titre suivant : Des chèvres et des hommes