Pluridisciplinaire - Si l’Ima (Institut du monde arabe) Tourcoing a l’heureuse idée de présenter une sélection d’œuvres d’artistes arabes conservées par le Centre national des arts plastiques (Cnap), il cherche à imposer une lecture politique qui réduit leur portée.
Commissaire associée, Camille Leprince a choisi de structurer l’accrochage en « foyers » thématiques, parsemés de références culturelles et politiques, qui prend le risque d’un trop-plein de signifiants. Ainsi la lutte des Palestiniens, présente dès le titre de l’exposition issu d’un poème de Darwich (« Les Sentinelles »), est-elle assumée par les commissaires comme « un référent commun du monde arabe ». Si les beaux portraits d’enfants palestiniens de Raed Bawayah attirent ici le regard, leur portée politique n’est pourtant pas première. La vidéo ironique de l’artiste palestinienne Basma Alsharif sur un amour contrarié n’aborde pas davantage la question politique… En limitant certaines œuvres à leur portée politique, la commissaire ferme la porte à d’autres interprétations. Certes, la célèbre Madone de Hocine Zaourar illustre les horreurs de la décennie noire en Algérie dans une esthétique qui reprend les codes de la peinture italienne, mais l’image comporte une dimension théâtrale que l’exposition n’évoque pas. D’autres œuvres contiennent cette charge théâtrale, dont la belle installation de Hassen Ferhani 143 rue du Désert, centrée sur une auberge du Sud algérien, ou la vidéo de Dania Reymond, qui fait rejouer à des enfants des scènes de son enfance. De même, le diptyque vidéo de Joana Hadjithomas et Khalil Joreige joue-t-il avec les souvenirs et la mise en scène pour évoquer les migrations en Méditerranée et les traces de la guerre. Sur les mêmes thèmes, Mehdi Meddaci transforme des blocs de béton d’une plage de Sète en scène de théâtre. La poésie aussi s’invite par petites touches dans l’exposition, dans les courts-métrages du collectif syrien Abounaddara filmés dans la rue depuis 2011, ou l’œuvre délicate d’Abdessamad El Montassir. Autour d’un personnage mythique et d’une plante du Sahara occidental, l’artiste tisse des récits de combats et de répression où la langue locale joue un rôle défensif. Même la courte vidéo de Ismaïl Bahri, où se déplie une coupure de journal arabe, prend des allures surréalistes, tout en évoquant un monde dans la tourmente.
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Des artistes arabes enfermés dans le politique
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°759 du 1 novembre 2022, avec le titre suivant : Des artistes arabes enfermés dans le politique