L’exposition ouvre sur une installation en verre sablé de Tony Cragg, inventaire opalescent qui lui donne son titre, Eroded Landscape, 1998, et se termine sur un cercle marmoréen de Richard Long.
Pureté des formes, fragilité du vivant, traces fugaces d’un passage humain… Des fleurs géantes prennent des allures de totem (Amorphophallus [Blue/Green], 2019, de Rossella Biscotti) ou de motifs délicats saisis par la lumière (Nuphar, 2011, de Jochen Lempert), des cours d’eau fantômes permettent de remonter celui de l’histoire grâce à leur image satellite (Mille Mississippi, 2016, Julien Discrit), des arcs-en-ciel subtils apparaissent à la surface d’une lune iridescente posée au sol (Chasing Rainbows, 1998, Anya Gallaccio), l’océan surgit à la tombée de la nuit comme une enseigne en néon (Ocean Rise Night Fall, 2018, David Horvitz). Le temps fait son œuvre : les peintures au cinabre de Mathieu K. Abonnenc lentement s’altèrent, et leur pigment rouge bientôt aura viré au noir (Études pour la chambre de la rançon (Atahualpa), 2018). Autant que d’un paysage imaginaire, cette proposition offre en effet une traversée de la collection du musée au prisme de l’inéluctable corrosion de la matière. L’établissement, ouvert en 1985, n’a cessé depuis de faire des acquisitions, avec une prédilection pour les formes minimales, et a bénéficié aussi de donations, comme celle, l’an dernier, d’Agnès Rein, dont témoigne la présence d’une pièce infiniment délicate de Christiane Löhr (Grass Stalks, 2014), architecture de végétaux enchâssés les uns dans les autres. Au-dehors, la forêt de Rochechouart s’offre en arrière-plan impassible.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°738 du 1 novembre 2020, avec le titre suivant : Déambulation méditative à Rochechouart