Avec « Reflets d’argent », le Musée des beaux-arts de Dijon présente le résultat des recherches menées depuis 1991 sur les communautés d’orfèvres bourguignons du XIVe au XXe siècle et sur leur profession. À travers plus de 200 pièces venues de collections publiques et privées, l’exposition dévoile quelques trésors, mais aussi toute une production domestique d’une étonnante variété.
DIJON - Plus que tout autre art, l’orfèvrerie a été régulièrement victime des vicissitudes de l’histoire : crises économiques, guerres ou révolutions ont entraîné des fontes massives pour recycler les objets somptuaires en monnaie sonnante et trébuchante. Parfois le Roi lui-même donnait l’exemple à ses sujets : Louis XIV a ainsi sacrifié en 1689 le fameux mobilier d’argent de la galerie des Glaces pour financer la guerre contre la ligue d’Augsbourg.
À l’aune de cette histoire mouvementée, l’exposition de plus de 200 objets d’orfèvrerie du XIVe au début du XXe siècle prend un relief particulier. Bien entendu, les pièces du Moyen Âge et de la Renaissance ne sont pas légion ; on y trouve pourtant l’exceptionnel chef-reliquaire de sainte Sabine en argent partiellement doré, réalisé au temps des ducs de Bourgogne, et vraisemblablement à leur demande si l’on en croit le poinçon à leurs armes. Centre religieux de premier ordre dans l’Europe médiévale, la région bourguignonne dut compter nombre d’œuvres de cette qualité. La production civile de cette époque, plus modeste, ne nous est en revanche pas parvenue, contrairement à celle du XVIIIe siècle sur laquelle l’exposition met l’accent. Si les vaisselles royales ont disparu dans la tourmente révolutionnaire, une production moins prestigieuse, notamment en province, a peu souffert de cette saignée et évoque aujourd’hui encore cet art de vivre. Les écuelles, cafetières, taste-vin, plats et autres accessoires de table rassemblés au musée témoignent de la virtuosité des orfèvres régionaux, en même temps que de la variété des créations locales qui font écho aux tendances parisiennes, du Louis XV au Louis XVI. Mais plus que stylistique, le souci des organisateurs – le Musée des beaux-arts et la Direction régionale des Affaires culturelles – a été historique : résultat de plusieurs années d’investigations consignées dans un ouvrage de référence, l’exposition insiste sur l’organisation des communautés d’orfèvres et la mutation de la profession au cours des siècles. Et surtout, elle met un nom sur bien des œuvres de haute qualité : Jean Millet, Guillaume Goliard à Dijon, Nicolas Fleury à Semur-en-Auxois ou Louis Radepont à Auxonne, autant d’orfèvres qui méritent une place aux côtés des grands peintres et sculpteurs bourguignons.
Jusqu’au 26 avril, Musée des beaux-arts, Palais des États de Bourgogne, 21033 Dijon, tél. 03 80 74 52 70, tlj sauf mardi 10h-12h et 14h-18h. Catalogue Les orfèvres de Bourgogne, coll. “Cahiers du Patrimoine�?, éditions du Patrimoine, 544 p., 1 100 ill. n&b dont 700 poinçons, 450 F.
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De l’église à la table
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°79 du 19 mars 1999, avec le titre suivant : De l’église à la table