Copie, reprise, interprétation..., si on utilise aujourd’hui volontiers le mot de remake, il convient de rappeler qu’il sert originellement à désigner un « film reproduisant, avec de nouveaux acteurs,
la première version d’un film à succès ». Longtemps cantonné à la seule production issue de l’industrie du cinéma, cette pratique a massivement investi depuis quelques années le champ des arts plastiques. Fort de ce constat, Thierry Davila a choisi de se pencher sur le phénomène pour tenter d’en explorer les enjeux tant théoriques qu’historiques et en dresser une cartographie. Le choix qu’il a fait de focaliser son propos sur les dix dernières années est parfaitement cohérent avec l’essor d’une production artistique dont les modèles ne sont plus nécessairement ceux de l’histoire de l’art mais ceux du cinéma. Il en est ainsi de l’œuvre de Pierre Huyghe de 1995, clairement intitulée Remake, reprenant quasi à la lettre Fenêtre sur cour de Hitchcock, ou de Brice Dellsperger, refaisant L’important c’est d’aimer de Zulawski avec un seul acteur jouant tous les rôles. Comme il en a été jadis de Manet reprenant le thème de La Barque de Dante de Delacroix ou de Picasso reprenant Le Déjeuner sur l’herbe de Manet. Copie, reprise, interprétation…, l’histoire de l’art s’est toujours nourri de ce genre de pratiques comme s’il s’agissait de certifier que, selon le vieil adage, « rien ne se perd, rien se crée, tout se transforme ». Car s’il y va d’un « trouble de la filiation », comme le propose Thierry Davila, sanctionnant le formidable succès de l’image filmique depuis une centaine d’années, il y va surtout d’un glissement somme toute assez naturel de nos champs de références en matière d’icône. En ce domaine, tant le cinéma et la vidéo que la télévision ont complètement subverti nos habitudes perceptives et la façon dont les artistes se saisissent du principe du remake leur permet d’interroger le fait de création dans cette qualité de mise en abyme permanente. Tantôt réemploi du texte, tantôt reprise en compte d’une seule séquence, tantôt seulement de la bande son, etc., « Remakes » réunit un choix d’œuvres de Bardin, Dellsperger, Draeger, Gordon, Huyghe, Jürss, Kopp, Lewis et Moser & Schwinger, chacune retenue pour des raisons spécifiques.
« Remakes », BORDEAUX (33), CAPC musée d’Art contemporain, entrepôt Laîné, 7 rue Ferrère, tél. 05 56 00 81 50, 23 octobre-11 janvier 2004.
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De l’art de la redite
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°553 du 1 décembre 2003, avec le titre suivant : De l’art de la redite