Edward S. Curtis (1868-1952) avait certes la passion de la photographie puisqu’il se confectionna lui-même son premier appareil lorsqu’il était enfant. Il mit cette passion au service des Indiens lorsque ceux-ci, bien que déjà persécutés, étaient encore capables de se battre, pas encore exterminés par les famines, la variole et l’alcool. Curtis a été le témoin de la déchéance de ce vanishing people puisqu’il l’a photographié pendant 30 ans, à partir de 1896, effectuant un travail colossal : 80 tribus observées dans leur vie quotidienne, pendant leurs cérémonies, leurs danses sacrées, dans leur habitat... Il se voulait un témoin de ce qu’il savait sur le point de disparaître, et se sentait proche des ethnologues de l’époque les plus sérieux. Aby Warburg lui acheta d’ailleurs à ses débuts des photos des Hopis. Et ce n’est pas par un désir morbide qu’il voulait fixer sur la pellicule des civilisations en train de s’évanouir. Au contraire, dans The North American Indian (un catalogue de vingt volumes !), il choisit de faire de l’Indien un héros, contribuant à l’ériger en véritable mythe. Certains le lui reprochèrent, mais en même temps que saurions-nous de ces Indiens sans ses photos ? Même « mis en scène », il se dégage de ces guerriers en costume d’apparat, mais aussi de
ces vieillards, de ces femmes qui sourient, de ce jeune homme nu, sans défense et superbe dans une rivière surgie d’un paradis perdu, une dignité, une innocence, que Curtis n’a pu inventer. Sa virtuosité technique est effarante et la beauté plastique des épreuves au platine, des tirages argentiques, des virages à l’or de la collection de Christopher Cardozo, ici présentée, est elle aussi stupéfiante.
PARIS, Hôtel de Sully, jusqu’au 31 décembre. À lire : Christopher Cardozo, E. S. Curtis, éd. Marval, 192 p., 490 F.
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Curtis, chantre des Indiens
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°520 du 1 octobre 2000, avec le titre suivant : Curtis, chantre des Indiens