PARIS
Une nouvelle hypothèse est proposée par le Musée du Moyen Âge quant à l’usage d’une série de coffrets qui auraient pu servir à protéger des livres sacrés pendant un trajet.
Paris. C’est un ensemble d’objets homogène et mystérieux que présente la petite exposition au premier étage du Musée de Cluny : des coffrets en bois gainés de cuir, bardés de fer et pourvus d’une serrure. Ces contenants ont la particularité de renfermer des estampes religieuses coloriées et marouflées, datées du tournant du XVIe siècle. La Bibliothèque nationale de France, l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris et le Kupferstichkabinett de Berlin ont ajouté leur collection à celle du Musée du Moyen Âge pour donner à voir une sélection de ces coffrets – on en recense aujourd’hui 140. Avec pour principale ambition de jeter la lumière sur l’usage qui en était fait, une information absente des sources écrites.
L’historiographie récente a voulu y voir des coffrets de messagers ou de pèlerinage aptes à véhiculer des laissez-passer. Mais l’examen physique récent de ces pièces atteste que ces petits meubles, difficiles à ouvrir, sont trop fragiles et peu pratiques pour supporter les aléas d’un long voyage. Ce sont pourtant bien des coffres de transport, probablement destinés à circuler sur une aire restreinte. L’absence d’usure de l’estampe indique qu’ils n’ont pas servi à abriter des denrées périssables ou des objets abrasifs. Leur taille et leur iconographie dévotionnelle (fondée pour cette dernière le plus souvent sur des dessins d’un certain Jean d’Ypres) concourent à privilégier l’hypothèse d’un usage dévolu à la sphère des clercs et de l’esprit. Sans doute ont-ils servi à protéger des livres sacrés : telle est la conclusion de l’exposition. C’est d’ailleurs ce que laisse supposer le volet droit du triptyque de l’Annonciation d’Aix de Barthélemy d’Eyck, présenté au sein du parcours, sur lequel un de ces coffrets est représenté au côté d’un prophète et d’une étagère chargée de livres… Margot Boutges
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°533 du 15 novembre 2019, avec le titre suivant : Coffrets à estampes, un secret bien gardé