Arts Décoratifs - Dans une exposition dévolue aux cabinets de curiosité, il y a inévitablement un champ sémantique spécifique puisqu’il est question d’artificialia, de naturalia, de scientifica et d’ethnografica.
Il semble qu’il faille désormais composer avec un nouveau vocabulaire plus orienté et anachronique, mettant à l’index stéréotype, appropriation, eurocentrisme et, bien sûr, colonialisme. La présentation des trésors des Collections nationales de Dresde vient nous rappeler, si besoin en était, que le regard sur les œuvres n’est pas neutre, mais conditionné par le Zeitgeist (« esprit du temps »). Hélas, parfois à outrance. À une époque où la question de la provenance et où les études post-coloniales sont devenues des sujets épineux dans l’appréhension des collections, le rapport aux œuvres « exotiques » acquises il y a plusieurs siècles est ainsi inexorablement prétexte à un discours coupable et culpabilisant. Qu’importe que les princes-électeurs de Saxe n’aient pas constitué une puissance coloniale et qu’ils aient été fascinés par la beauté des objets et la virtuosité de ces artisans actifs aux quatre coins du monde, leur intérêt pour ces merveilles est forcément marqué du sceau du soupçon. Quelle tristesse de voir cette centaine d’objets précieux reléguée au rang de témoignage honteux d’un prétendu regard concupiscent et raciste. Cette grille de lecture à charge engendre en effet des lectures confondantes de manichéisme et empêche toute délectation. Et ce ne sont pas les contrepoints contemporains, aussi inutiles que caricaturaux, qui sauvent l’affaire.
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Chefs-d’œuvre otages de l’air du temps
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°760 du 1 décembre 2022, avec le titre suivant : Chefs-d’œuvre otages de l’air du temps