PARIS
Disséminée dans le Petit Palais, à Paris, la présentation des pièces de la créatrice brouille la distinction entre exposition et « showroom ».
PARIS - Est-ce une exposition monographique… ou bien un beau coup de pub pour le fabricant de mobilier Cassina, son principal mécène ? On ne peut s’empêcher de se poser la question en visitant cette présentation déployée au Petit Palais, à Paris, et intitulée « Charlotte Perriand, de la photographie au design ». D’autant que, à quelques encablures de là, rive gauche, la firme transalpine, éditeur officiel d’une quinzaine de meubles signés Perriand, organise en parallèle une vaste opération de communication à l’occasion de son « arrivée » au sein du grand magasin Le Bon Marché. La célèbre Maison de thé de Charlotte Perriand (jardin de l’Unesco, Paris, 1993) a été reconstituée et, évidemment, elle s’accompagne d’une exposition-vente de pièces de la créatrice « rééditées depuis peu dans des finitions spécifiques » (dixit l’enseigne).
Le problème, au Petit Palais, est le mélange des genres. Les cartels ne mentent pas : « Structure métallique fabriquée spécialement par Cassina » (Chaise longue basculante), « Fabrication contemporaine, Édition Cassina » (chaise Ombre), « Déclinaison en bois, Collection Cassina » (Chaise longue en bambou), « Édition Cassina » (fauteuil Grand Confort), « Reconstitution contemporaine par Cassina » (banquette Méandre)… Bref, le trouble est de mise lorsque l’on retrouve des pièces actuellement rééditées à la fois à l’intérieur de la présentation et à l’extérieur, en point d’orgue, dans une salle disposée façon showroom.
Vertèbres et galets
L’exposition proprement dite est, elle, par trop éclatée. Y figurent des photographies de Charlotte Perriand (1903-1999) : elle est très belle et son sourire est radieux sur ce portrait datant de 1928 réalisé par Pierre Jeanneret, sur lequel le facétieux Le Corbusier tient derrière la tête de l’impétrante une assiette en guise d’auréole. Mais aussi des clichés réalisés par Perriand elle-même, notamment cette série intitulée Tôles compressées. Plus loin, la créatrice évoque son travail dans le film Créer l’habitat au XXe siècle ; ailleurs, des meubles et des installations sont disséminés au beau milieu des collections permanentes… Le propos se brouille à l’envi. Certes, le visiteur découvre quelques pièces splendides comme la bibliothèque Martel, mince zigzag de bois habillé de deux portes de métal coulissantes, ou la table Éventail, qui s’étire dans toutes les directions. Mais une plus grande homogénéité n’aurait pas nui à la compréhension. Au final, seul le hall Jacqueau permet de se concentrer sur l’œuvre. D’un côté est décortiquée la démarche constructive, de l’autre, ses influences sous la forme d’objets et de photographies. En regard d’une Potence d’éclairage pivotante est ainsi affiché un cliché de Perriand montrant la Bôme d’un voilier en Croatie, image antérieure d’une année à la création de la lampe. Ailleurs, des morceaux de bois flottés côtoient des vertèbres ou des galets. Perriand puisait au plus près de la nature pour élaborer ses fameuses formes organiques, et décidément « libres ».
Jusqu’au 18 septembre, Petit Palais, avenue Winston-Churchill, 75008 Paris, tél. 01 53 43 40 00, du mardi au dimanche 10h-18h, jeudi jusqu’à 20h, www.petitpalais.paris.fr
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Charlotte Perriand, de l’édition à la réédition
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Abonnez-vous dès 1 €Commissariat : Gilles Chazal, conservateur général et directeur du Petit Palais ; Sylvain Lecombre, conservateur en chef des musées de la Ville de Paris ; Pernette Perriand et Jacques Barsac, commissaires associés
Nombre de pièces : environ 500, dont 380 photographies et 70 meubles
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°347 du 13 mai 2011, avec le titre suivant : Charlotte Perriand, de l’édition à la réédition