Cézanne et Courbet deux arpenteurs de terroir

Elle est plus sombre chez Courbet, plus lourde et comme humide des eaux de sa province. Elle est allégée et sèche, solaire chez Cézanne, restituant les ascèses de sa chère Provence. Pour ces deux artistes, cette pâte qui est la vie même a une force assez sauvage pour pousser Courbet à rendre « la nature telle qu’elle est » et Cézanne à « dire la vérité en peinture ».

Le pari étant osé, les interrogations, voire les doutes qui se lèvent en évaluant le bien-fondé de la confrontation de ces maîtres se dissipent progressivement, à mesure que les thèmes abordés mettent en relief les convergences et les divergences. Plus que les portraits ou les natures mortes, ce sont les paysages qui rapprochent ces deux arpenteurs de terroir, leur volonté de s’emparer des rochers, des falaises, des arbres, des sources, d’en posséder les secrets. Quand Courbet descend vers la Loue, Cézanne monte vers Gardanne. L’un et l’autre se retrouvent sur un unique plan, celui de leurs rapports à la matérialité qu’ils dépassent et amènent « au visible », c’est-à-dire jusqu’à l’essence de la beauté. Le regard aiguisé par les parallèles proposés cherche derrière les identités propres d’autres accords possibles.