Bruxelles, capitale de la ligne claire, devait commémorer dignement le centenaire de la bande dessinée. Au milieu d’une infinité d’initiatives, l’exposition "Cent ans de bande dessinée aux États-Unis" vient compléter le panorama du Centre belge de la BD, et offre aux amateurs un face-à-face intéressant entre deux mondes, différents mais pas étrangers.
BRUXELLES - Le Centre belge de la BD, inauguré en 1989 dans les anciens magasins Waucquez dus à Horta, est l’une des rares institutions muséologiques européennes à prendre pour objet la bande dessinée. L’aventure commence le 17 février 1895 avec le Yellow Kid de Richard Outcault. Elle ne s’arrêtera plus. Les amateurs de comics retrouveront avec plaisir les planches originales de Buster Brown, Jimmy Swinnerton, Little Nemo, Betty Boop, Mandrake le Magicien, Dick Tracy, Connie ou Calvin et Hobbes, sans oublier Tarzan, le récent orphelin de Burne Hogarth. On saura gré aux organisateurs de n’avoir pas tenu à l’écart le cinéma d’animation, qui donna très vite – dès 1908 en France, avec la Fantasmagorie d’Émile Gohr, et dès 1911 aux États-Unis, avec la première apparition sur écran de Little Nemo – un prolongement à la BD.
L’exposition, si elle ne met pas en évidence la spécificité de la bande dessinée américaine et omet largement d’intégrer cette production dans une approche sociologique, est intéressante par la qualité des planches exposées et par le face-à-face qui s’instaure avec les collection permanentes, surtout marquées par l’école belge. Mais la difficulté de mettre en scène la bande dessinée sans en trahir la signification est particulièrement frappante. Sacralisée par le musée, la BD semble perdre sa substance.
S’il semble loin le temps où la BD était interdite à l’école et passait tantôt pour le roman du pauvre, tantôt pour une image indigente, on s’étonnera de voir une muséologie à ce point décalée par rapport à son objet. Ici, la planche est mise en scène comme un dessin classique, et l’originalité se limite à quelques dioramas – statiques – ou à des objets tirés de l’univers de la BD comme de quelconques reliques. Manifestement, la bande dessinée n’a pas encore sa muséologie spécifique. Et même si des tentatives aussi passionnantes que le Musée des ombres de Schuiten et Peters (en 1990 et 1991) ont tracé une voie intéressante, l’imaginaire de la BD semble encore bien loin du musée.
CENT ANS DE BANDE DESSINÉE AUX ÉTATS-UNIS, Centre belge de la bande dessinée, tlj sauf le lundi de 10h à 18h, jusqu’au 7 avril, 20 rue des Sables, 1000 Bruxelles. Informations : (2) 219 19 80.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Cent ans de bulles dans du chewing-gum
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°23 du 1 mars 1996, avec le titre suivant : Cent ans de bulles dans du chewing-gum