Camoin de retour chez lui à Montmartre

En 1914, assailli de doutes sur sa peinture et brisé par un chagrin d’amour, il détruit son atelier et découpe en plusieurs morceaux environ 80 tableaux qu’il jette ensuite au rebut. L’épisode, digne d’un roman sur les artistes maudits, aurait pu s’arrêter là. Mais les restes sont récupérés par un chiffonnier, qui les rapièces les encadre et les vend ; ils passent ensuite de marchand en marchand, et certains sont même mis aux enchères par une honorable maison de ventes parisienne. Furieux, le peintre intente un procès, qu’il remporte. Sa victoire, qui pourrait sembler anecdotique, pose, en réalité, ni plus ni moins que les bases de la législation de la propriété intellectuelle, qui protège encore les artistes. Ironie de l’histoire, trois des toiles qu’il avait vouées aux ordures figurent aujourd’hui parmi les œuvres phares de l’exposition monographique que lui consacre le Musée de Montmartre. Autre clin d’œil savoureux, bel hommage au fauve méditerranéen que l’on voit trop peu à Paris – la dernière exposition remonte à plus de quarante ans –, ces retrouvailles ont lieu à l’emplacement exact de l’atelier de Camoin. Le parcours, riche d’une centaine de pièces, offre une vision assez complète de sa production, alternant les tableaux les plus iconiques, telle La Saltimbanque, avec des œuvres plus confidentielles issues de collections particulières.