musée

Au paradis d’Heaven

L'ŒIL

Le 1 février 2000 - 268 mots

Dans cette exposition organisée par la Kunsthalle de Düsseldorf et intitulée « Heaven », le ciel flirte avec l’enfer. Et l’ange se transforme presque toujours en monstre. Les deux frères anglais Chapman en sont le clou et y présentent d’ailleurs leur tout récent Model of Hell !... Ou comment notre idéal de beauté, notre notion du sublime, notre sens de la perfection ont évolué et subi moult transformations et dommages. Cette exposition qui se veut en phase avec son époque, à savoir le début d’un nouveau millénaire, peut aussi être interprétée comme les visions très décadentes d’une fin de siècle somme toute classique. L’adage « La beauté sera convulsive ou ne sera pas » des surréalistes devient une bluette, une référence à l’eau de rose devant le « cauchemar climatisé » qu’évoque ce choix d’œuvres. Ici la beauté est faite de consommation déjà consommée. Elle est glacée, aseptisée, morte, vinylisée, embaumée, computérisée... Le prince charmant y est un revenant comme le Elvis Presley doré de Jessica Diamond ou un mutant comme le Michael Jackson de Jeff Koons. Les vraies princesses ne font rêver que transformées en pop star (la Lady Di devenue Madonna de Luigi Baggi), le corps des femmes est robotisé, trafiqué (les robes de Thierry Mugler ou l’image de Mariko Mori). Le sacré est à la fois dans l’immatériel, l’artificiel, et le frisson dans l’horreur. Quant à admirer des métamorphoses, on aurait préféré voir celles de Cindy Sherman plutôt que celles de Orlan. Mais il est clair que, dans cette exposition, le sublime est dans le kitsch le plus pur.

LIVERPOOL, Tate Gallery, jusqu’au 27 février.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°513 du 1 février 2000, avec le titre suivant : Au paradis d’Heaven

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