Musique

Sheila, Daho, Hallyday…

Atours de tournées

Par Margot Boutges · Le Journal des Arts

Le 22 novembre 2016 - 671 mots

Le Centre national du costume de scène s’aventure avec succès sous des projecteurs moins classiques pour entrer dans la lumière des stars de la chanson.

MOULINS - C’est l’exposition-événement qui aurait dû marquer l’anniversaire des dix ans du Centre national du costume de scène (CNCS) au printemps dernier. Elle a finalement été repoussée au mois d’octobre, car jugée trop difficile à mettre en place dans les délais impartis. Il faut dire qu’exposer les costumes de scène de stars de la chanson, de l’entre-deux-guerres à nos jours, sort le CNCS de ses pratiques habituelles. L’institution moulinoise s’est fait la spécialité de montrer les atours de théâtre, de danse et d’opéra émanant de ses propres fonds ou prêtés par des établissements culturels. Si des institutions conservent quelques costumes de chanteurs et chanteuses décédés (comme cette robe de Mistinguett au MuCEM ou cet ensemble de Barbara à la Cité de la musique), c’est rarement le cas pour des personnalités toujours vivantes. C’est donc principalement vers les interprètes mêmes ou leurs héritiers que le CNCS – qui a renoncé à solliciter des prêts internationaux et s’est concentré sur le répertoire français (lire encadré) – s’est tourné pour donner à l’exposition un visage contemporain. Zizi Jeanmaire, Matthieu Chedid, Sylvie Vartan, Étienne Daho, Juliette Gréco, Mademoiselle K, Yelle, Sheila… ont ainsi ouvert leur garde-robe, avec plus ou moins de facilité. « On a beaucoup fonctionné par ricochet, souvent c’est un artiste qui nous a introduits auprès d’un autre artiste », explique Stéphane Malfettes, commissaire de l’exposition. « Pour Johnny Hallyday par exemple, c’est une connaissance commune, en l’occurence l’artiste JR, qui m’a mis en contact avec son épouse qui a tout de suite été emballée par le projet d’exposition », raconte-t-il.

De la scène au mythe

Le CNCS n’a pas eu tort de s’aventurer sur cette nouvelle voie. Les costumes des stars de la chanson sont en effet un matériau qui mérite d’être examiné de près, et qui pourrait bien commencer à rejoindre les collections du musée après cette exposition. Au travers d’une succession de vitrines thématiques, le parcours montre comment le « costume de scène est un élément stratégique (...) de construction de la propre mythologie du chanteur » : ainsi dans cet espace consacré aux vêtements choisis par leurs porteurs pour être identifiés et reconnus, du canotier de Maurice Chevalier au bandana rouge de Renaud ; ou celui dédié aux costumes dorés qui traduisent chez qui le porte la volonté de sacraliser son personnage. La scénographie se fait discrète, sans être redondante, pour donner au costume le premier rôle. Celui-ci émerge dans un subtil éclairage, telle une relique moderne qui suggère en creux, l’aura de l’artiste. Une dimension qui atteint son paroxysme dans le petit espace consacré à Claude François dont les peignoirs – conservés avec dévotion par un collectionneur privé – voisinent les vidéos montrant l’idole jetant le vêtement en éponge imprégné de sueur à ses fans à la fin d’un concert. Gageons que cette exposition rencontrera un grand succès, pour l’intérêt de son propos et pour sa capacité à toucher un large public. Car elle repose moins sur le plaisir de la découverte de ce qu’on ne connaît pas que sur celui, très rassembleur, de retrouver ce que l’on connaît déjà : une galerie de personnages faisant partie d’un patrimoine collectif. D’autant que l’exposition, qui présente aussi bien les lunettes de Maître Gims, chanteur tantôt adulé tantôt conspué par la génération Z, que la robe fourreau de la vedette octogénaire du music-hall Line Renaud parlera véritablement à tous les âges.

La haute couture voyage

Le CNCS, qui espérait à l’origine une exposition d’ampleur internationale, a revu ses ambitions à la baisse. « Faire venir des costumes du monde entier s’est révélé trop compliqué et onéreux », explique Stéphane Malfettes. On trouve tout de même dans le parcours des tenues de stars venues des États-Unies (Madonna, Beyoncé, Lady Gaga, Rihanna…) prêtées non pas par les chanteuses elles-mêmes, mais par les maisons de couture françaises (Jean-Paul Gaultier, Thierry Mugler, Alexandre Vauthier…) qui les ont habillées.

Déshabillez-moi ! Costumes de la pop et de la chanson

Jusqu’au 5 mars 2017, Centre national du costume de scène, Quartier villars, Route de Montilly, 03000 Moulins, tél. 04 70 20 76 20, www.cncs.fr, tlj 10h-18h, entrée 6 €. Catalogue éd. Gourcuff Gradenigo et CNCS, 144 p., 25 €

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°468 du 25 novembre 2016, avec le titre suivant : Atours de tournées

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