Non seulement il est l’une des figures majeures du groupe CoBrA, créé en 1948, mais Asger Jorn, né et mort au Danemark, 1914-1973, en est le théoricien le plus actif.
Auteur de très nombreux textes visant à définir une esthétique nouvelle, il en signe notamment un, intitulé Les Formes conçues comme un langage, dans lequel il fait la part belle à la couleur, à l’impulsivité et à l’irrationnel. L’idée sur laquelle repose la pensée esthétique de Jorn est de renouer avec le paganisme ancien, son sens de la fête et sa liberté d’expression, par là de retrouver quelque chose d’une origine qui tient à une forme quasi primitiviste.
Si l’on connaît bien la peinture de l’artiste, son œuvre graphique est davantage restée confidentielle alors même qu’elle est une précieuse clef à l’appréhension de sa démarche. D’une grande richesse d’invention, elle témoigne de certaines filiations esthétiques comme ce vieux fonds nordique de signes gravés dans la pierre qui fondent la mythologie scandinave et son fantastique bestiaire. De même est-elle révélatrice des relations complices qu’il a entretenues avec le surréalisme révolutionnaire – pour ne pas dire anarchique – qu’il a rejoint sitôt après la guerre.
Fondateur d’un éphémère Bauhaus imaginiste, membre de l’Internationale situationniste (1957-1959), Jorn se voulait de tous les clans interrogeant les rapports de l’art et de la société, combattant l’excès d’intellectualisme et allant jusqu’à créer son propre Institut de vandalisme comparé. Bref, il refuse de se plier à tout mot d’ordre et à toute idéologie, considérant que le visuel et le sensible ont leurs propres lois et qu’« on ne peut isoler aucune expression artistique en se fondant sur sa forme ».
Constituée d’une centaine d’œuvres parmi les quelque cinq cents dessins que Jorn a donnés au fil du temps entre 1956 et 1972 au musée de Silke-borg, l’exposition du Centre Pompidou nous invite à une véritable plongée dans la couleur et dans l’expression. Si la gestualité et la spontanéité qui caractérisent son œuvre peinte se retrouvent dans ses dessins, il y va toutefois d’une mesure encore plus grande, et à l’épaisseur de la matière picturale fait place une luminosité plus intense. À la lisière entre figuration et abstraction, tant il est vrai que Jorn était passé maître dans l’art de la défiguration.
« Asger Jorn, dessins », Centre Pompidou, Musée national d’art moderne, galerie d’Art graphique, Paris IIIe, www.centrepompidou.fr, jusqu’au 11 mai 2009.
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Asger Jorn
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°612 du 1 avril 2009, avec le titre suivant : Asger Jorn