DIJON
- Située dans un superbe hôtel particulier, la galerie Barnoud présente un large éventail des créations d’Isabelle Lévénez. Projetée sur la vitre extérieure de la véranda, les personnages « jumeaux » de la vidéo Double Je surgissent de l’obscurité pour entamer une étrange chorégraphie : l’un boxe dans le vide, pendant que l’autre se plie sous les coups d’un invisible agresseur. À l’intérieur, le visiteur découvre une nouvelle série de travaux intitulés Abandon : présentés sous verre, des petits morceaux de papier chiffonnés sur lesquels ont été rapidement jetés quelques mots écrits avec maladresse. Fonctionnant comme autant de petits exutoires, ces phrases évoquent les angoisses, fantasmes et pulsions que chacun peut éprouver à un moment de sa vie, mais qui se traduisent rarement par un passage à l’acte. L’artiste matérialise cette délivrance en donnant corps à la culpabilité collective.
Galerie Barnoud, 27 rue Berlier, 21000 Dijon, tél. 03 80 66 23 26, jusqu’au 15 octobre.
PARIS
- Soumettant depuis plusieurs années le corps à de multiples transformations, pour ne pas dire mutilations – obstructions de tous les orifices sensoriels par exemple –, Aziz Cucher évoluent à présent vers une pratique plus abstraite. Le corps humain reste à la source de leur démarche mais de façon plus évocatrice que réaliste. La série de photographies Interiors, actuellement présentée à la galerie Yvonamor Palix, représente des vues d’intérieur, sombres espaces de circulation (couloirs, escaliers…) dont le revêtement est en fait constitué d’un épiderme humain avec ses pores et ses grains de beauté. Alliant métaphoriquement espace clos et enveloppe extérieure, les artistes créent un univers étrange parce qu’à la fois irréel et familier. Manipulations numériques et génétiques apparaissent également intimement liées dans les photographies de la série Chimeras : figures mutantes composées de parties humaines et fragments d’appareils informatiques.
Galerie Yvonamor Palix, 13 rue Keller, 75011 Paris, tél. 01 48 06 36 70, du 15 septembre au 3 novembre.
- Yasumasa Morimura poursuit sa quête de la beauté en insérant son propre corps dans celui des personnages qui figurent sur les tableaux, réinterprétant ainsi, à sa manière, les chefs-d’œuvre de l’histoire de l’art. Dans sa série Dialogue intérieur avec Frida Kahlo, il rend hommage à la fameuse artiste mexicaine qui, à travers sa pratique de l’autoportrait, a également abordé la question de l’identité. Dépassant le strict cadre de l’histoire de la peinture, Morimura s’intéresse depuis le milieu des années 1990 aux idoles contemporaines : actrices (Marilyn Monroe, Catherine Deneuve, Brigitte Bardot…), et chanteurs (Mickael Jackson, Madonna…). Frida Kalho, dont la vie tumultueuse a aidé à construire sa légende, est devenue à son tour un personnage culte, une icône du féminisme et de la culture pop. Morimura qui joue avec la pratique du travestissement depuis de nombreuses années – utilisant pour ce faire des modes d’expression variés (vidéo, performances …) – pousse sa démonstration à l’extrême dans cette dernière série de photographies. Féminin ou masculin ? Peinture ou photographie ? Tout simplement l’ambiguïté élevée au rang d’œuvre d’art.
Galerie Thaddaeus Ropac, 7 rue Debelleyme, 75003 Paris, tél. 01 42 72 99 00, jusqu’au 2 octobre.
VENCE
- « Comme à la maison » n’est pas une exposition telle qu’on a l’habitude d’en voir : les œuvres ne sont pas cantonnées dans un espace réservé, sagement installées sur des cimaises immaculées, elles envahissent tout l’espace, récréant l’atmosphère d’un intérieur imaginaire. Œuvre d’art totale en quelque sorte, l’exposition provoque des rencontres inattendues entre des créations contemporaines et anciennes, mêlant œuvres d’art, mobilier, luminaires, céramiques de tous styles et de toutes époques confondues. Comme dans un immense cabinet de curiosité, le visiteur déambule et croise les œuvres de Jean-Michel Basquiat, Raymond Hains, Yves Klein, Barbara Kruger, Bertrand Lavier, Serge Mouille, Gaetano Pesce, ou encore Andy Warhol. La superbe claustra de Fabrice Hybert, qui ouvre l’un des murs, résume à elle seule le propos de la manifestation : dévoiler ce que pourrait être l’intimité d’un collectionneur lors d’un regard furtif.
Galerie Beaubourg, château Notre-Dame des Fleurs, 2618 route de Grasse, 06145 Vence cedex,
tél. : 04 93 24 52 00, jusqu’au 31 décembre.
NEW YORK
- John Coplans a toujours été le chouchou de la critique, notamment parce qu’en tant qu’ex-critique et rédacteur en chef légendaire de la revue Artforum, il a su montrer qu’il était possible de mener une belle carrière d’artiste même à un âge avancé de la vie. Avec l’augmentation de l’espérance de vie d’une population prospère qui semble être immortelle, un nouveau genre s’est développé : celui des portraits de personnes âgées particulièrement marquées par le temps. John Coplans n’est certainement pas étranger à l’éclosion de ce style avec ses photographies en clair-obscur représentant des fragments de son propre corps.
Il expose à la galerie Andrea Rosen plusieurs nouvelles séries de travaux dont une, intitulée Self Portrait (interlocking Fingers), mettant en scène ses mains, thème qu’il avait inauguré seize ans plus tôt. Fortement agrandis, les détails que l’artiste a choisi de sélectionner offrent une vision du corps qui balance entre abstraction et hyperréalisme.
Andrea Rosen Gallery, 525 West 24th Street, New York, tél. 1 212 627 6000, du 7 septembre au 13 octobre.
- Philip Guston est le genre d’artiste dont on ne se lasse jamais, quelles que soient les différentes périodes de sa carrière, qu’il soit peintre du réalisme social du New Deal, artiste abstrait savoureux ou révisionniste figuratif et bourru. Mais c’est encore dans ses nombreuses œuvres graphiques que Philip Guston semble être le meilleur, et en particulier lorsqu’il collabore avec ses nombreux amis poètes et écrivains. Poète manqué, épistolier, barbouilleur d’encre, illustrateur ou maître en littérature marginale, il brille d’un éclat excentrique qui correspond mieux à notre goût pour le spontané que ses toiles trop chargées. C’est donc un plaisir de retrouver, à la galerie McKee, la série de dessins sur Nixon que l’artiste a réalisée sans complaisance pendant les heures les plus noires du président. Ces dessins originaux, datant de 1971 et présentés dans un nouveau recueil, ont pour titre Poor Richard. Philip Guston réussit le tour de force de les rendre à la fois émouvants et violemment satiriques.
McKee Gallery, 745 Fifth Avenue, New York, tél. 1 212 688 5951, du 7 au 29 septembre.
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Artistes et galeries à travers le monde (14 septembre 2001)
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°132 du 14 septembre 2001, avec le titre suivant : Artistes et galeries à travers le monde (14 septembre 2001)