Choisis par le poète et romancier Michel Butor, une soixantaine de masques des cinq continents révèlent les splendeurs réunies par les Barbier-Mueller.
PARIS - Les hommes se cachent depuis longtemps derrière des masques. Sacrés, de guerre, de carnaval ou de sport, ils revêtent tous les aspects et tous les sens. À travers un choix de pièces issues de la collection Barbier-Mueller – initiée dans les années 1920 par Josef Mueller et poursuivie par Jean-Paul Barbier-Mueller jusqu’à aujourd’hui –, le Musée Jacquemart-André entend montrer cette diversité, au fil des époques et dans le monde entier, puisque les cinq continents sont représentés. Sélectionnés par le poète et romancier Michel Butor et en majorité présentés pour la première fois au public, les masques sont ici réunis selon un parti pris étonnant. L’écrivain a cherché à constituer des « familles de masques », suivant ses intuitions et sa sensibilité, en rassemblant les pièces selon des affinités formelles. Un choix qui suit l’idée même de la collection Barbier-Mueller de privilégier les qualités esthétiques à la valeur intrinsèque de l’objet, historique et scientifique. Une soixantaine de visages, d’une grande diversité de lieux et d’époques – de l’Antiquité à nos jours –, sont donc répartis selon qu’ils sont compatissants, protecteurs, méditatifs, furieux ou énigmatiques. Sont exposés, au gré des salles, des masques africains, européens, américains, chinois, iraniens, javanais, précolombiens, des masques de théâtre tibétain, népalais ou japonais, des masques d’Alaska – dont un superbe oiseau polychrome –, une tête effrayante du Sri Lanka… dans des rapprochements étranges qui fonctionnent parfois bien, comme la saisissante section consacrée aux masques grimaçants.
Le plus gênant dans cette exposition, qui réunit indiscutablement des pièces exceptionnelles, est qu’elle met uniquement en valeur leur dimension esthétique. Aucune n’est replacée dans son contexte, les cartels sont minimalistes et le petit livret donné au visiteur – qui ne décrit que quelques objets – est difficilement lisible dans l’obscurité des salles. Les masques exposés ont pourtant en premier lieu une valeur d’usage et un sens. Certains sont des objets rituels, symbolisant le passage de la vie à la mort, des masques de cérémonies ou de danses, porteurs d’un message, qu’il soit sacré ou profane. D’autres sont des masques de théâtre, de guerre – un masque anglais de 1917 –, de sport (un masque de gardien de but de hockey américain). Il manque donc à cette présentation, conçue comme « une exposition poème », un vrai propos, ou simplement les lumières nécessaires pour comprendre le sens des masques, et les capter dans ce qu’ils ont d’essentiel.
Jusqu’au 28 août, Musée Jacquemart-André, 158, bd Haussmann, 75008 Paris, tél. 01 45 62 11 59, tlj 10h-18h. Cat. éditions Hazan, 372 p., 190 ill., 45 euros.
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Approche masquée
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Abonnez-vous dès 1 €- Commissaires : Jean-Paul Barbier-Mueller et Nicolas Sainte-Fare Garnot - Scénographe : Jana Ansermet - Nombre de pièces : 80 - Nombre de salles : 6
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°218 du 24 juin 2005, avec le titre suivant : Approche masquée